Sorti en catimini chez nous malgré un joli succès US, "C’est la fin" a un mérite, assez rare, de ne ressembler à rien de connu et de ne s’imposer aucune limite… au point qu’on ne cesse de se demander, pendant le film, comment des producteurs ont pu accepter de produire un truc aussi barré et aussi autocentré sur un microcosme hollywoodien (en gros, les acteurs sortis de l’école Judd Apatow) en imaginant que le grand public (hors Amérique du Nord surtout !) pourrait être intéressé. Car il faut être quand même assez calé sur la filmo des différents acteurs présents à l’écran et, plus généralement, sur le cinéma comique US de ses 15 dernières années (version Apatow donc) pour apprécier à sa juste valeur les innombrables références dont nous abreuvent les dialogues. Ce parti-pris est, d’ailleurs, la force et la limite du film. C’est, incontestablement, sa force car on ne peut que se délecter de l’incroyable casting réuni pour l’occasion et de l’invraisemblable autodérision de tous ces acteurs. Il faut voir Seth Rogen
faire son fameux rire à la demande ou se faire bâcher sur son interprétation du Green Horne
t, Jay Baruchel être présenté comme
un pseudo anti-conformiste détestant Hollywood
, James Franco en
nouveau riche se la jouant artiste
, Jonah Hill
être obséquieux au dernier degré avant de se faire sodomiser par un démon
, le méconnu Craig Robinson apprécier le fait de
devoir boire sa propre urine
ou encore Dany McBride être un
connard vulgaire et sans manière
. Et quel pied de voir le nombre invraisemblable de caméo (tous issu ou presque de l’école Apatow) réunis pour l’occasion, tels que
Emma Watson, Paul Rudd, Rihana, Christopher Mintz-Plasse, Jason Segel (qui clashe l’évolution de son rôle dans "How I met your mother" !) et, surtout, le sage Michael Cera transformé en cocaïnomane lubrique et Channing Tatum en esclave sexuel
! Le spectateur (ou plutôt le fan) a vraiment l’impression de se retrouver en famille, sensation renforcée par la reformation de duo ou de trio mythique des comédies US
(Rogen et Franco parlant d’un "Délire Express 2", Hill, Cera et Mintz-Plasse réunis comme dans "Super Grave"…
). Ce casting incroyable (qui ferait pâlir d’envie bon nombre de producteurs) est d’autant plus enthousiasmant que le début du film promet une immersion (parodique certes) dans le milieu hollywoodien, avec ses villas démesurées, ses fêtes invraisemblables et, surtout, des vannes méta à la pelle sur la carrière des acteurs, sur leur image, sur leurs états d'âmes, sur leur relation plus ou moins idyllique (avec, en point d’orgue, Baruchel qui déteste Hill)… le tout avec un fil conducteur amusant, à savoir l’amitié entre les deux acteurs canadiens Seth Rogen (en nouvelle star du rire US) et Jay Baruchel (en acteur à la notoriété plus confidentielle qui reproche à son pote d’avoir changé). Cette relation, ainsi que la présence des autres acteurs dans leurs propres rôles permettent, d’ailleurs, au film de s’autoriser une petite réflexion sur leur métier et leur vie, en exposant leurs névroses au passage. Certes, le tout est bien camouflé sous une épaisse couche de fun mais c’est un petit plus non négligeable qui renforce le ton méta du film. Tout semble, donc, aller pour le mieux
jusqu’à la première attaque annonciatrice du début de l’Apocalypse
! Pour ceux qui n’ont rien lu du film avant de le voir, le choc a dû être assez rude car, dans le genre changement de ton WTF, on a pas fait aussi fort depuis "Une nuit en enfer" ! Ce n’est, d’ailleurs, pas
l’attaque
en elle-même qui pose problème puisqu’elle est, non seulement, surprenante mais m’a provoqué
un pseudo anti-conformiste détestant Hollywood
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! Le problème est que, à partir de cette scène, "C’est la fin" perd en cohérence et en régularité au niveau du rythme, tout comme elle perd le sens des limites. Résultat, on se retrouve devant un film qui peine, un peu, à avancer mais qui se trouve émaillé de coups de génie comique
un pseudo anti-conformiste détestant Hollywood
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et de délires gores pas forcément indispensables
un pseudo anti-conformiste détestant Hollywood
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. Mais surtout, à mesure que la réalité de l’Apocalypse se confirme, le film gagne en noirceur et perd ce côté "film de potes" qui fait des clins d’œil au fan… Difficile d’être totalement détaché face au sort de
un pseudo anti-conformiste détestant Hollywood
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… et ce d’autant plus que le film ne laisse jamais entendre que
un pseudo anti-conformiste détestant Hollywood
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. Ce ton presque trop premier degré m’a un peu bridé dans le dernier tiers…
un pseudo anti-conformiste détestant Hollywood
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. Définitivement, "C’est la fin" est un film cohérent en ce qu’il a les défauts de ces qualités et que les reproches qu’on peut lui faire sont inhérents à sa conception même : c’est un film de sales gosses d’Hollywood, adeptes des blagues potaches et de l’autodérision et, surtout, refusant de s’imposer la moindre limite. Ca n’en fait pas un film parfait mais, à tout le moins, un OVNI intéressant.