La princesse de Montpensier est un bon film, même s’il n’est clairement pas un chef-d’œuvre du fait d’aspérités assez nombreuses.
Premier point, l’interprétation. Celle-ci est globalement très bonne, à commencer par Mélanie Thierry. Cette dernière est une actrice très talentueuse, à mon sens une des plus prometteuses, et livre une composition remarquable. Toute en finesse, elle évite continuellement la retenue trop glaciale, et l’excentricité mal venue. Elle a vraiment trouvé l’équilibre pour son personnage, et elle le porte avec talent et non moins de charme. A ses cotés Lambert Wilson joue la carte de l’expérience. C’est un bon acteur, il le prouve ici avec une prestation solide et sobre. Il marque clairement aux cotés de Thierry. C’est encore le cas de Gaspard Ulliel. Ce-dernier s’impose sans difficulté face à Grégoire Leprince-Ringuet. Dans les rôles principaux Leprince-Ringuet est le seul à vraiment ne pas s’en tirer. Il est très fade, se fait systématiquement voler la vedette par ses comparses à l’écran, et ne donne pas de relief à son personnage. Les émotions passent mal, et c’est assez regrettable.
Sur le scénario, il n’y a pas grand-chose à redire. L’histoire est agréable (faut dire que la source est quand même solide), et s’appuie avec intelligence sur ses personnages. Malheureusement Tavernier ne conduit pas son affaire avec une grande souplesse. Il y a des lacunes en matière de fluidité, de transitions, on passe parfois très abruptement d’une séquence à une autre. Peut-être comptait-il sur le fait d’avoir des spectateurs uniquement initiés au texte de Madame de La Fayette, mais un réalisateur ne doit jamais raisonner ainsi. Coté rythme il est certain que l’amateur d’action devra passer son chemin. Globalement il n’y a rien à redire, pour le genre j’entends, même si parfois Tavernier aurait pu donner un peu plus de consistance à son film pour renforcer son intensité.
La forme enfin. Là je suis assez partagé. Sur la mise en scène d’abord, Tavernier est clairement trop neutre. Il est très, trop détaché de ce qui se passe à l’écran. Il observe, il contemple, et jamais la caméra n’est franchement participative, ce qui est le propre généralement d’un film trop académique. Sorte de catalogue d’images papier glacé. C’est un choix qui peut se justifier dans certains cas. Mais ici il y a du sentiment, et du sentiment enflammé, de la passion, et cela ne transparait pas vraiment dans le travail du réalisateur. C’est plan-plan, soigné mais toujours objectif. On sent l’expérience mais pas la fougue. Dommage avec un tel sujet. La photographie elle est inégale. Parfois absolument magnifique (le final dans la neige est superbe par exemple), les scènes nocturnes sont ratées. On se croirait presque en plein jour, elles ne dégagent alors aucune ambiance, aucune atmosphère, et paraissent délavées. C’est bizarre comme sensation, et ce décalage qualitatif m’a énormément surpris. Par contre en matière de décor et costume il n’y a rien à redire. C’est sublime. Il y a une grande variété de lieux, un travail de reconstitution maitrisé, on sent une volonté réaliste. Enfin la musique est non moins belle. Sarde a fait une bande son magistrale. Il est clairement un des plus grands compositeurs français vivants de musique de film, et là il ne déroge pas à sa réputation, excellant particulièrement dans les films en costume.
En somme, La princesse de Montpensier est un métrage de qualité, c’est indéniable. Il a de très bons points. On regrettera cependant que Tavernier n’ait pas été à la hauteur du talent de Mélanie Thierry et du scénario en béton qui était le sien en proposant une mise en scène trop scolaire. C’est raffiné mais la force des sentiments, la puissance des confrontations, le lyrisme et le drame, le comique parfois ne nous est rendu que par les acteurs qui abattent franchement et heuresement un boulot remarquable (sauf Leprince-Ringuet pas à la hauteur de l’enjeu). C’est dommage. Les manques de cet acteur ici, la photographie inégale, m’oblige objectivement à une note de 3.5. Néanmoins, un film à voir, à condition ne pas s’attendre à un film historique plein de batailles, ici c’est surtout une histoire de sentiments.