Droogie ! J'ai vu une péloche là, hier, dans mon plumard, qui narre l'histoire d'une escort girl de luxe dans ses pérégrinations à travers New-York. En plus, un grand poète a écrit quelque part que l'actrice principale, à savoir Sasha Grey, était une star du X et qu'elle peut se faire, je cite : "defoncer dans tous les sens par 20 gars si il le faut" !
Par pitié Droogie, parle-nous de ce film, car j'aimerais savoir ce que t'en as pensé !
Mais oui Droogie, pas de problème ! Alors Girlfriend Experience est avant tout réalisé par un auteur, et non par un Michael Bay like. Cet auteur, c'est Steven Soderbergh, déjà primé à Cannes en 1989 pour Sexe, mensonges et vidéo. D'ailleurs, pour l'anecdote, c'est le plus jeune réalisateur à avoir reçu la palme d'or, il avait alors 26 ans. Précoce et au style particulier qui en a rebuté plus d'un, Soderbergh tente avec son 20ème long-métrage qu'est Girlfriend Experience un nouvel exercice de style, en composant l'intégralité de son oeuvre de scènes courtes et entremêlées, au sein desquelles nous pouvons nous immiscer dans les journées de travail de Chelsea, la fameuse escort girl du film.
Ce qui déroute de prime abord, c'est la normalisation et la robotisation de Chelsea vis-à-vis de la prostitution. Certes, le film X est une forme de prostitution, et le choix de l'actrice par Soderbergh est d'autant plus important. Egalement, le fait qu'elle partage sa vie avec un homme conscient que sa copine soit escort girl (et cela va même plus loin que de l'escorte, finalement) doit rester un sujet tabou, au risque de tout faire péter au sein du couple. Il doit supporter ça sans en faire mention, comme si de rien n'était.
Si l'idée originale est intéressante sur le papier, la retranscription à l'écran est déjà plus brouillonne. Le réalisateur semble se perdre dans son mêli-mêlo visuel et scénaristique, et il est parfois difficile de suivre le fil de la bande sans se pommer dans cette anarchie chronologique que nous propose tonton Steven. Second point, et pas des moindres, il m'est avis que le film manque cruellement de profondeur et d'humanité. Peut-être que les ressentis, et l'intensité émotionnelle auraient dû être plus appuyés, pour taper là où ça fait mal chez le spectateur. Car le film, avec un tel sujet, en aurait été capable, et aurait vraiment serré les tripes !
Passé cela, certains critiques, à mon sens, exagèrent leurs propos. Quand je lis que "Soderbergh nous vend bel et bien du vent." ou "Sasha Grey (...) manque trop cruellement de charisme pour relever le niveau de ce film expérimental et décousu." je me dis que, décidément, nous n'avons pas vu le même film. Pour un premier rôle dans un film traditionnel, la demoiselle tient parfaitement le choc, et son coma émotionnel veut tout dire pour ce qui est de l'obligation dans ce genre de métier de se soustraire à ses sentiments. D'ailleurs Droogie, la même chose est dite par Zidler dans Moulin Rouge ! Soderbergh nous vend du vent ? Non. Il nous vend une photographie du monde d'aujourd'hui. Une photographie de l'aliénation dans laquelle se baigne, peut-être sans s'en rendre compte, une humanité qui, elle, est décousue, et qui a perdu toutes ses valeurs.