Le bleu du ciel qui se reflète à la surface de la mer appelle à unir deux éléments opposés que tout, dans les caractéristiques, unit. «Salt of this sea» (Palestine, 2008) d’Annemarie Jacir produit le même mouvement, écrit le même geste de réunion entre deux éléments semblables que l’espace sépare. Née aux Etats-Unis, Soraya a l’ambition de revenir habiter sur la terre de ses parents. En premier lieu, elle compte seulement récupérer l’argent que ses parents ont laissé dans un compte en banque. Or depuis l’annexion d’une parcelle du territoire palestinien par Israël, l’argent conservé sur un compte est devenu indisponible. Par piété filiale, et en raison également d’une petite mais vive rancœur pour Israël, Soraya, accompagnée d’Emad et de son ami Marwan, vont fuir la Palestine pour venir occuper, à leur proportion, un territoire qu’ils considèrent comme légitimement le leur. Étant mise hors de la maison de ses aïeux, Soraya en vient à occuper pour foyer une grotte désignée comme patrimoine naturelle. Jacir dessine le mouvement d’un retour, développe les émotions toute fordienne qui accompagne la recherche nécessaire d’un foyer. Cette poursuite vers les origines, sur fond d’une nature contrainte et comme assénée sous les ruptures des frontières, emprunte des voies agressives, des scènes de tension. Jacir n’est pas dupe, elle sait pleinement combien la reconquête d’un lieu, la reterritorialisation des individus sur une zone en passe par des hostilités. La Palestine résonne au son de Soraya, elle se fait entendre lorsque, de rage et de lassitude, elle crie contre l’injustice. Cet appel si fréquent à l’injustice rend le film partial et arbitraire. Jacir n’organise pas les raisons qui opposent Israël à la Palestine, elle n’en révèle pas les motifs mais se contentent de décrire la petite émotion, de retranscrire le phénomène de souffrance que connaît tous palestiniens. En conservant l’obscurité de ses sentiments, Jacir tombe dans l’écueil de la chronique.