Kornel Mundruczo, le réalisateur de Delta, parle de son long-métrage, qui évoque une relation d'amour entre un frère et sa soeur : "Plutôt que d'évoquer frontalement la déviance sexuelle, j'ai voulu aborder la notion de liberté. Une liberté qui permettrait à un individu de transcender la norme. L'inceste n'est pas au coeur du récit, il s'agit plutôt du courage dont il faut faire preuve pour accepter une attirance naturelle brisant tabous et conventions. L'intolérable, c'est que certaines personnes croient avoir le droit de persécuter quiconque ne se plie pas à la norme."
Kornel Mundruczo, le réalisateur de Delta, estime que "la "bonté" des deux héros transcende les notions basiques et les conventions sociales. Je n'en fais pas une question morale, mais une question de liberté individuelle. On ne peut pas les juger d'un point de vue moral. Ces personnages vivent leur propre vérité de manière authentique, ils suivent seulement leurs sentiments, même s'ils devront forcément se heurter aux moeurs admises. Ils ne vivent pas leur amour comme une rebéllion, et ce ne sont pas eux qui violent la loi ou en viennent à la violence."
S'il parle d'une relation amoureuse entre un frère et sa soeur, Delta aborde aussi le thème universel du désir d'un retour vers la nature, vers une vie simple. Le réalisateur Kornel Mundruczo : "Ce désir de retour vers la nature, je n'ai pas souhaité qu'il apparaisse naïf ou romantique. Je me sens plus proche de l'idée de Rousseau qui veut que l'homme soit naturellement bon à l'état de nature, puis corrompu par la société. (...) Leur amour est si pur qu'ils veulent croire qu'ils échapperont à la règle. Mais la nature ne vous permet pas d'aller contre la marée, pas plus en tout cas que l'ordre social ne permet liberté et indépendance."
Le titre Delta fait référence à la région du delta du Danube, en Roumanie, où a été tourné le film. Le réalisateur Kornel Mundruczo déclare avoir "trouvé ces paysages très évocateurs. J'avais l'impression que ce no man's land immobile offrait un immense potentiel de drames cachés et inattendus. J'ai su immédiatement que ce delta m'inspirait, et que je voulais y faire un film. Mais la réalité géographique et sociale de la région n'est pas le sujet du film. J'ai choisi cet endroit parce qu'il paraît hors du temps et qu'il véhicule quelque chose d'archaïque. C'est un endroit magnifique, habité par des personnes extraordinaires. Certes, les habitants vivent bien dans le présent, mais leur univers est encore très isolé, oublié. Bâtir une maison dans cet endroit relève du symbole, mais c'est également tout à fait réaliste. Je n'ai pas voulu incorporer les paysages au récit de manière voyante, il n'en ont pas besoin tant ils sont puissants en soi. Et ils jouent un rôle primordial dans le film."
Félix Lajkó, l'acteur principal de Delta, est musicien avant d'être comédien. Ce joueur de violon célèbre en Hongrie a ainsi également composé la musique du film. Félix Lajkó a intégré le projet Delta après le décès, en cours de tournage, de Lajos Bertók, qui tenait initialement le rôle principal du film.
Pour Delta, le réalisateur Kornel Mundruczo retrouve l'actrice Orsolya Toth, avec laquelle il avait déjà collaboré sur Pleasant days et Johanna. A son sujet, il déclare : "A l'écran, Orsolya apparaît toujours comme un être sans défense, la pureté et la sensibilité qu'elle dégage la rendant très vulnérable. Mais elle n'est pas qu'une projection cinématique : c'est aussi une très belle personne."
En 2008, Delta a été présenté en Sélection Officielle, section Compétition, du 61e Festival de Cannes. Festival de Cannes où le long-métrage a remporté le Prix FIPRESCI. C'est la deuxième fois que le réalisateur Kornel Mundruczo se rendait sur la Croisette, trois ans après le film Johanna, présenté dans la section Un Certain Regard. A noter que Delta a remporté le Grand Prix du Hungarian Film Week, le plus important festival de films en Hongrie.