Le cinéma sud-coréen ne cesse de me surprendre par sa qualité car il mélange le professionnalisme américain et une sensibilité qui parle au public européen. Un peu normal de la part d'une nation qui est décrite comme celle des 'Latins d'Extrême-Orient'. Le cinéma du Pays du Matin Calme propose souvent une recette tout à fait unique pour ses films : des instants de grâce, des explosions de violence soudaines et, parfois, si extrêmes qu'elles peuvent paraître déjantées, et une critique ou des observations sans concession sur la société sud-coréenne. C'est le cas de Mother, un petit bijou de cinéma. Qu'on est loin de la pauvreté sidérale des films US, et de l'amateurisme encore souvent prégnant du cinéma français ! Mother, c'est l'histoire d'une paria de la société sud-coréenne : femme âgée, seule, pauvre, vivant dans une banlieue rurale d'un mélange d'acupuncture, de soins, de ventes d'herbes et de petits trocs, élevant un fils simple d'esprit. L'antithèse des jeunes Séoulites entièrement retouchées, entièrement soumises à l'égo, éprises de consommation aveugle, avides de s'insérer dans la vie réelle par les rues branchées de Gangnam (c'est l'équivalent du XVIème arrondissement à Séoul). Mother est un personnage que toute la société sud-coréenne ne veut plus, ou ne peut plus voir. Le meurtre sordide d'une jeune fille est vite attribué au fils de cette femme. Or, ce fils est tout ce qui lui reste, la dernière parcelle de chemin balisé dans une vie qui n'a plus aucun sens. Elle entreprend donc toute seule, sans le moindre appui, le difficile exercice de prouver par elle-même que son fils est innocent, prunelle de ses yeux qu'elle aime aveuglément. Oui, aveuglément est un bon terme, car il y a des causes qui incitent à fermer les yeux. Un bijou que ce film !!