Mikael Hafström signe un film d’action d’un autre temps, avec un tandem de stars vieillissantes d’un autre temps encore. Pour autant, la recette qui faisait miracle dans les années 80, voir 90, fonctionne toujours, dans une mesure toute mesurable, dans l’esprit mélancolique, nostalgique, des amateurs de testostérones de ces années révolues. Oui, une bonne majorité des générations cinéphiles de notre temps redécouvriront, non sans un certain plaisir, deux de leurs plus grands héros de jadis dans un film attractif faisant la part belle à la castagne et l’action. Si l’alliance entre Rambo et Terminator n’est pas, pour le coup, une exclusivité, arguons tout de même qu’ici la place prise par chacun d’entre eux ne tient pas de l’anecdote ou du simple fait d’un rassemblement amical, mais bel et bien d’entrer dans la peau de personnages qui ne sont pas sensés faire figure de parodie. Si cet exercice n’est pas réellement concluant, les deux acteurs ne cesse de rappeler aux bons souvenirs de leurs gloires passées, pour une fois, l’on ne se contente pas de ressasser des répliques cultes.
Le réalisateur, quant à lui, au sortir d’un laborieux The Rite, qui voyait Anthony Hopkins s’infliger une mauvaise note en prêtre démonique, s’offre un casting de tout premier choix commercial qu’il semble avoir du mal à gérer. Dès lors, il apparaît clairement que l’homme derrière la barre semble toujours être l’énergique Sylvester Stallone. Si durant le tournage, l’acteur aura dû surmonter le deuil, la mort de son fils, il n’en apparaît aucune séquelle à l’écran. Le vieux baroudeur offre encore quelques exploits physiques, quelques belles tirades, rivalisant aisément avec son compagnon de route, Arnold Schwarzenegger, qui quant à lui, ne semble pouvoir s’extraire d’une certaine mélasse. Si le retour au cinéma de l’ex-gouverneur de Californie est une excellente chose, commercialement parlant, d’abord, il n’empêche que contrairement à Sly, celui-ci semble avoir passé l’âge de jouer au déboite épaule et bourre pifs, une mitrailleuse à la main. Espérons que sous la direction de David Ayer, Schwarzy sera nettement meilleur qu’ici, du moins en terme de charisme.
Oui, la problématique tient ici du simple fait que les deux acteurs vedettes ne peuvent réellement entrer dans un rôle, écrit pour eux ou non, sans jouer de leurs statures et des évènements que constituent leurs apparitions communes. Bref, passé sur le fait que les mecs derrières les barreaux n’ont qu’un nom, ceux de Stallone et Schwarzenegger, le scénario, se voulant inventif, en fait des caisses en terme de petites ingéniosités. Oui, si l’on admet que les connaissances en terme d’évasion du premier rôle sont relativement ingénieuses, voir intéressantes, il apparaît bien vite que le tout ne tourne qu’en faveur de l’héroïsme improbable du bon gentil de l’histoire. La frontière entre bien et mal est elle aussi bafouée par un metteur en scène qui considèrent tout du long l’ensemble des détenus comme des victimes de leurs tortionnaires. Dès lors, l’un des criminels enfermés, que Hafström s’applique à définir comme un rebus lié à Al-Qaida se transforme une demi-heure plus tard en fidèle compagnon de la juste cause, l’évasion.
Peu probable, typiquement anecdotique dans son récit, Evasion livre tout de même son lot de réjouissances, d’un strict point de vue divertissement. Descendu par la presse spécialisée, plébiscité par le public, lors de sa sortie, soyons au moins certain que le film n’aura en rien prétériter les finances de ses producteurs, bien au contraire. Et pour cause, le cahier des charges est pleinement rempli, sans réel talent mais rempli tout de même. Paradoxalement, si comme moi, Evasion vous aura fait vivre deux bonnes heures de bonne nostalgie, il convient d’admettre que des films comme celui-ci, on pourrait en faire une bonne trentaine par année sans se fouler la ratte. C’est sans doute comme ça que l’on peut mesurer la réelle valeur d’un film d’action. Amusant mais anecdotique, spectaculaire mais illusoire. 09/20