Pour son premier long-métrage, en 2008, Mona Achache choisissait d'adapter le roman à succès de Muriel Barberis, "L'élégance du hérisson". L'une des qualités du best-seller tenait à la finesse des portraits psychologiques des 3 protagonistes, très différents les uns des autres, dont la romancière croisait le destin dans le microcosme d'un immeuble chic parisien pour former un triangle de personnalités particulièrement orignal. On les retrouve tous dans le film et l'alchimie fonctionne. Il y a Paloma, 11 ans, adolescente à l'intelligence fulgurante, qui dissèque son entourage à travers le viseur de son caméscope. Peu encline à l'indulgence, le spectacle de sa famille l'afflige et le monde des adultes ressemble pour elle à un bocal à poissons. Elle annonce d'entrée la couleur : le jour de son prochain anniversaire, elle se suicidera. Il y a aussi le nouveau copropriétaire, Kakuro, veuf japonais d'un raffinement extrême, âme noble et délicate, profondément bienveillante. Et puis, celle dont il est question dans le titre, la concierge. Madame Michel a 54 ans. Veuve, aigrie, mal coiffée, mal fagotée, invisible à tous les étages, elle distribue le courrier, rentre et sort les poubelles, aspire les mégots sous les paillassons. N'attendant rien de personne ni de la vie, elle a borné son univers à sa loge, partageant son temps libre entre son chat, ses tablettes de chocolat, son thé et la littérature, tendance auteurs classiques et philosophie orientale. Car sous ses dehors revêches, la concierge est une érudite. Les bases de l'histoire étant posées, on a compris les affinités et comment le destin va se mêler de rapprocher les solitudes. Fidèle à l'esprit du roman, la réalisatrice s'est entourée d'une pléiade d'acteurs de talent pour donner chair aux différents personnages. En tête de liste, Josiane Balasko, parfaite de sobriété dans le registre dramatique. Anne Brochet est étonnante et très drôle dans le rôle de Solange Josse, la maman de Paloma, dépressive, autocentrée et complètement barge. Wladimir Yordanoff incarne avec retenue et justesse le père, Paul Josse, ministre noyé sous les problèmes au gouvernement, sensé mais résigné à la maison face à une épouse maniaco-dépressive et à 2 filles caractérielles. Togo Igawa se glisse dans les chemises blanches de Kakuro, la distinction à l'état pur. La jeune Garance Le Guillermic prête sa blondeur à Paloma. Tantôt attendrissante, tantôt casse-pieds, elle a un jeu très juste. On retrouve aussi dans de plus petits rôles, Ariane Ascaride et Gisèle Casadesus. Pendant 1 H 40, l'histoire, truffée de références symboliques et ponctuée de séquences animées, se déroule en quasi huis-clos entre les murs d'un immeuble cossu. C'est parfois un peu cliché. Le rythme est plutôt lent, il ne se passe pas grand chose. On entre simplement dans l'intimité des résidents, on les découvre, on les regarde vivre, ils nous deviennent familiers et l'on s'y attache. La fin, brutale, ne surprendra pas ceux qui ont lu le roman...