Drive est l'exemple typique du film envers lequel je nourrissais de nombreuses attentes et qui s'est finalement avéré décevant. J'ai pourtant apprécié les premières minutes du long-métrage, qui nous embarquent instantanément dans la double vie que mène le personnage principal. Honnête travailleur la journée, il utilise ses talents derrière un volant pour servir toute sorte de crime avec lesquels il n'entretient aucun rapport une fois la nuit tombée. Selon ses propres règles, il incarne parfaitement le héros solitaire pour qui rien ne semble avoir une réelle importance.
Le rythme du film est donc relativement lent, pour nous transmettre à travers les images cette même apathie que ressent le Driver, afin de nous positionner dans un état semblable au sien. Le problème principal réside donc, à mon sens, dans l'antipathie que provoque Ryan Gosling, très silencieux, complexe, nous n'arrivons jamais vraiment à le connaître ou à le comprendre. La base du film résidant sur sa relation avec les autres personnages il devient donc énormément difficile d'être touché par cette histoire, tant une distance nous sépare du héros. Nicolas Refn affirme pourtant avoir voulu rendre l'authenticité du bouquin à travers les images. Cependant, quand un livre peut se perdre dans les profondeurs d'un esprit pour dévoiler des sentiments et une personnalité aux lecteurs, un film se doit de suggérer le tout à travers tous les procédés possibles et imaginables. Ici, je n'ai pas retrouvé une complicité poussée avec le personnage, qui enlève donc de son charme au déroulement de l'histoire.
S'il est vrai que j'ai particulièrement apprécié la réalisation de Nicolas, je n'ai pas toujours compris l'enchaînement et la profondeur des séquences. Je n'adhère par exemple pas aux musiques utilisées dans le film, qui ne colle pas à l'atmosphère sombre et pesante (tout comme les écritures roses, de très mauvais goût). Seul la romance grandissante entre Driver et Irene est touchante (Carrey Mulligan excelle d'ailleurs dans le rôle de la femme qui hésite, qui doute, qui est dépassée par les évènements), et justifie de temps à autres le choix de cette bande-son. Les passages les plus agréables se révèlent alors être ceux où le héros partage des moments de complicité avec cette famille. L'ensemble est donc très poétique, s'évitant au maximum des dialogues trop présents, pour laisser le spectateur seul face à la beauté des images. Si la qualité de la mise en scène ne peut être renier, je considère que cela n'est pas suffisant pour propulser Drive où il aurait réellement pu être propulsé.
Par l'exploitation d'un scénario complexe (dans sa forme j'entends), les risques étaient nombreux, et les mauvaises surprises sont malheureusement de mise dans le dernier tiers du film. Je ne comprends toujours pas la tournure de l'histoire, et je reste sceptique devant le manque de crédibilité des acteurs, qui subissent un scénario qui tire les mauvaises ficelles et qui livre un final qui n'est surprenant que par son manque d'originalité et son vide émotionnel. L'alternance entre contemplation et action était pourtant jusque là utilisée à bon escient, mais elle finit par se perdre dans des réactions qui deviennent surréalistes. Le point noir du film est donc cette incapacité à tirer profit de la richesse de cet univers pour livrer une histoire cohérente du début à la fin.
La poésie n'est pas marquante de par la barrière gênante qui se pose devant le spectateur, et la violence n'est pas non plus marquante, par son apparition qui en devient presque illogique et incompréhensible. Je suis donc mitigé moi-même, le film est beau, propre, et visuellement agréable, mais est-il vraiment quelque chose d'autre ? J'ai des doutes, la fin n'est pas justifiée, l'extrospection du personnage n'est pas exploitée comme il se doit, et il ne bouleverse à aucun moment. Prouesse stylistique certaine mais manque de profondeur, je comprends l'enthousiasme de beaucoup vis-à-vis de ce travail, pour ma part je préfère m'arrêter au feu orange.