"Que justice soit faite" met en scène la procédure pénale américaine, très différente de la nôtre, et ses acteurs. Je crains qu'une partie des spectateurs ne considère que la justice française fonctionne de la même manière, c'est un premier problème.
Le débat auquel le film invite, à savoir celui des prétendus laxisme et complaisance du système, ne peut donc pas être posé dans les mêmes termes en France. En effet, en droit français, le doute ne profite pas autant à l'accusé. Les jurés statuent en leur intime conviction. Le "plaider coupable", institution qui choque les français parce qu'elle consiste à négocier avec un accusé qui reconnaît sa culpabilité, n'existe pas non plus dans notre système.
Deuxième problème : en admettant qu'on débate sur le système judiciaire américain, le film n'est pas, à mes yeux, totalement représentatif de la justice américaine. Il ne pose pas les principaux problèmes, parce qu'il cherche à plaire.
Les principaux problèmes du système pénal américain, sont d''abord qu'il peut conduire des innocents à la chaise parce qu'ils n'avaient pas un avocat suffisamment bon pour rivaliser avec un procureur tout puissant. Si l'accusé n'a pas de quoi payer des détectives privés et des contre-expertises, il n'a aucune chance.
Ensuite, le système US est trop sévère, or toutes les études de sociologie démontrent que plus le taux d'incarcération est élevé, plus la délinquance est élevée (et pas l'inverse).
En somme, la justice américaine n'a absolument pas pour trait caractéristique d'innocenter les coupables. Toutefois, le fait que le doute profite à l'accusé peut être un véritable problème. C'est le cas illustré dans ce film, où par malchance, les preuves réunies contre le coupable ne sont pas exploitables. Le cas est d'autant plus marginal que l'exploitation des preuves incombe au procureur, qui a tout intérêt à confondre l'accusé, à grand renforts de moyens policiers. Le fait que le doute profite à l'accusé n'est que la contrepartie d'un déséquilibre structurel de la procédure américaine, ce que le film passe magistralement sous silence. A cet égard, "que justice soit faite" manque d'ambition, et constitue une oeuvre tronquée.
Du point de vue strictement cinématographique, enfin, Gerard Butler n'est pas très convaincant dans son rôle un tantinet caricatural de rancunier sadique. Le chantage à la bouffe et au plumard est grotesque. Le coup de la victime anonyme qui est un ancien terroriste ou un ancien de la CIA, on ne sait pas vraiment, c'est aussi un peu gros. Le tunnel est un ratage complet, dont on aurait facilement pu se passer. Quelle connerie de scénario ! Il restera juste du visionnage un banal "film de vengeance" dont l'idée a été assez mal exploitée.