Malgré la pitoyable réalisation des pieds nickelés de Zaléa tv, ne dépassant jamais la forme du discours de propagande (un comble pour un docu sur un défenseur de la liberté de penser !), ces entretiens entre Daniel Mermet et Noam Chomsky parviennent à révéler l'intérêt de la pensée politique radicale, mais néanmoins subtile, du grand linguiste (malgré le fait que ses travaux de linguistique ne soient jamais évoqués), par delà même les torsions auxquelles ses thuriféraires français (Mermet, Bricmont, Ramonet et la clique du Monde Diplo...) voudraient tout au long du film l'y contraindre.
En effet, contournant les questions faussement naïves, et souvent assez perverses, d'un Mermet servant sa soupe relativiste habituelle, Chomsky s'y montre comme un penseur extrêmement rigoureux, rationaliste héritier de la philosophie des Lumières, intransigeant avec la politique des Etats-Unis et tout à la fois patriote américain (on voit notamment comment il fut fortement marqué par l'iniquité absurde de la “diplomatie musclée” à l'époque de Nixon-Kissinger).
Complétant agréablement cet entretien qui fut, on le devine, assez concis, l'interview du sociologue canadien Normand Baillargeon est aussi passionnante : celui-ci retrace la naissance des services de “relations publiques” dans les Etats-Unis des années 1920 et leur prépondérance dans la manipulation des foules consentantes.
En faisant abstraction de sa forme lamentable, ce film peut donc être apprécié comme un véritable petit précis de clairvoyance sur la société du Spectacle, et ses miroirs aux alouettes affolées.