Dans les élans d’une écume, Aditya Assarat fait jaillir délicatement la fraîcheur d’une idylle. Ce miracle porte le nom de «Wonderful Town» (Thaïlande, 2007). L’amour et sa lente dynamique semble être l’objet de fascination que le cinéma thaïlandais aime à retranscrire. Sur les traces du «Ploy» de Pen-ek Ratanaruang, Assarat s’emploie au même geste, à la même légèreté des sentiments qui reproduit avec sagacité la subtile complexité des émotions. Plus que ce même climat sentimental, Assarat partage avec Ratanaruang l’intrusion indolente du crime. Le viol soudain de «Ploy» côtoie le meurtre sanctifiant de «Wonderful Town». Cette double incarnation du mal et cette même discrétion pernicieuse témoigne des affres qui marquent la Thaïlande. De ce point de vue «Wonderful Town» est plus explicite. Deux évènements se déroulent en parallèle, tendant à ne produire qu’un seul et même phénomène, celui de la création. Sur les terres de Takwa Pa, village ravagé par le tsunami de décembre 2004, un jeune architecte supervise l’avancée des travaux. Jeune et anciennement perdu, Ton fait la connaissance de Na. Cette rencontre, au contraire de celles standardisées par le cinéma romantique américain, a de superbe qu’elle ne révèle pas d’entrée l’entière composition de ses cartes. La douceur des rapports et leur progressive mise en application distille dans le film la teneur d’une plaie profonde. Trois ans après les ravages du tsunami, le cinéma thaïlandais, sous l’influence de Weerasethakul, révèle son deuil. La torpeur trompeuse des récits cache une virulence intérieure, que les images, par excès de pudeur, n’oserait révéler. Négatif de la profusion violente des cinémas occidentaux, le cinéma de Thaïlande n’est pas moins exempt de violence. La violence n’est que mise en-déça des apparences, dans les rapports ébranlés des protagonistes. Un cinéma des rapports, où tout s’y joue enfin, voilà la nécessité d’une nouvelle modernité.