Big Eyes est le nouveau film de Tim Burton, sorti le 18 avril 2015 en France. Inspiré d’une histoire vraie, il dépeint la relation tumultueuse entre une peintre talentueuse et un artiste raté. Démuni du moindre don artistique, mais doté d’une solide fibre commerciale, Walter Keane profite du talent de son épouse Margaret en s’attribuant la paternité de ses tableaux. Grâce à son audace et à ses relations, Keane gagne rapidement en notoriété, au point d’apparaître dans les journaux et à la télévision.
Il entame également un nouveau modèle pour le commerce des œuvres d’art. D’ordinaire vendues en galeries ultra-sélect, elles seront démocratisées et leurs reproductions vendues à petit prix. Pourquoi ne vendre qu’une seule œuvre pour des milliers de dollars quand on peut en vendre des millions à quelques dollars ? L’avidité de Keane étant sans limite, il ira jusqu’à vendre des affiches jusque-là gratuites et à vendre des produits dérivés (tasses, posters) dans les supermarchés. Il est ainsi un précurseur de la consommation de masse artistique…
Un autre point soulevé tout au long du film est le sort réservé aux femmes seules. Tim Burton n’a de cesse de critiquer l’impitoyable société américaine des années 50 et le réitère dans Big Eyes. Ainsi, le quartier résidentiel où vivaient Margaret, son premier mari et leur fille Jane ressemble à s’y méprendre à celui d’Edward aux Mains d’Argent. Quitter le domicile conjugal, pour une femme, n’était pas admis dans les mœurs… Dans la situation de femme divorcée, trouver un emploi est chose quasi-impossible. Margaret ira jusqu’à être accusée de « vie dissolue » par son ex-mari, et risquer de perdre la garde de sa fille unique. C’est ainsi que l’histoire commence puisqu’elle épouse Walter Keane pour garder sa fille près d’elle. En outre, le film montre clairement que l’héroïne n’aurait pas pu atteindre un tel niveau de succès en tant que femme artiste, l’art féminin étant tout simplement dénigré… La misogynie de la société de l’époque est ainsi un élément-clé du succès de Walter.
Les acteurs :
Comment ne pas saluer la performance de Christoph Waltz, interprétant à la perfection Walter Keane ? Déjà unanimement reconnu, il nous livre ici un jeu d’acteur… tout simplement bluffant. Entre crises de colère et subtile manipulation, il est convaincant tout au long du film. Amy Adams n’est pas en reste qui nous subjugue en femme soumise puis empruntant le chemin de l’émancipation.
La bande-son :
Danny Elfman collabore une fois encore avec Tim Burton… toujours pour le meilleur ! La bande-son accompagne subtilement et agréablement le film, sans lui en voler la vedette. Du grand art.
Les décors :
Comme dans Edward aux mains d’argent ou Dark Shadows, Tim Burton recrée une atmosphère vintage, nous plongeant ici dans la Californie de la fin des années 50. Les bâtiments, les véhicules, le style vestimentaire… Rien n’est laissé au hasard et on se laisse bercer avec délice dans cette atmosphère.
Pour finir, certes le film se démarque des autres films de Tim Burton, car moins délirant et plus éloigné de son univers… Mais le sujet, traité à merveille, s’y prête moins. Le film n’en reste pas moins passionnant.