"Big Eyes" est un très bon film qui bénéficie d'un scénario très intéressant. On suit avec beaucoup d’intérêt cette fraude artistique scandaleuse. L’enjeu véritable du film, c’est la focalisation sur les deux personnages. Le scénario traite de la déloyauté, la trahison, de l’émancipation et la recherche de l’identité. Le portrait qu’il dresse des deux deux personnages est très bien travaillé. Le portrait de l’escroc est très beau, Walter est obsédé par le gain, à un point que la perte de contrôle survient, quelles sont donc ses limites? Jusqu’où est-il prêt à aller pour garder secrète sa supercherie mondiale, qui n’était à la base qu’un petit mensonge? La descente aux enfers de ce couple idyllique représente donc tout l’intérêt de l’oeuvre. Les acteurs sont formidables. Très en forme, Waltz apporte beaucoup de relief et de dynamise à l’ensemble. Complètement déjanté mais connaissant les nuances dans ce jeu, celui-ci se révèle très fin, rendant ainsi le personnage charmant tout comme insupportable. Acteur exceptionnel, il joue avec perfection cet escroc qui manie avec brio l’art de la communication. Son jeu deviendra magistral, unique – on peut accumuler toute la série de synonymes – dans la scène du tribunal, qui deviendra très vite culte. Amy Adams apporte beaucoup de fraîcheur au film, on la retrouve ici dans un rôle plus rigide, plus fermé peut-être que dans d’autres films, avec moins de liberté, mais l’actrice a su apporter sa touche personnelle et rend le personnage totalement sympathique. Très grande actrice, Amy Adams possède un visage très cinégénique, qui magnifie l’actrice et la rend éblouissante. Le duo quelle forme avec Christoph Waltz est magique et très dynamique. A noter aussi le caméo de Margaret Keane et le manque de présence à l’écran pour les seconds rôles, notamment Terence Stamp, alors que les acteurs proposent un jeu très prometteur. Les seconds rôles ne font qu’un enrobage dans ce film, malheureusement. En perdition artistique depuis des années, Tim Burton réalise un film plus sobre, plus intimiste, personnel. Fini les effets spéciaux fantaisistes des films précédents auxquels je n’adhérais pas, c’est le réalisme qui prime maintenant ! L’aspect déjanté des personnages ressort donc bien mieux puisqu’ils se trouvent dans un cadre réaliste, et donc sont hors du commun. Le film est donc certes réaliste, mais son côté déjanté s’en ressort bien mieux. Magnifiant l’imposture, la réalisation de Burton est pleine de malice et de tendresse, une tendresse destinée à tous ses personnages, pour lesquels le réalisateur refuse de faire un jugement net. Au premier abord, le film pourrait sembler ne pas être burtonien, mais il l’est complètement, la sauce burtonienne est appliquée dans un univers réaliste, ce qui ne rend pas le film hésitant comme le peuvent penser certains, mais très original. Film de très bonne qualité, Tim Burton rend indéniablement un très bel hommage à l’histoire des Keane. Au passage, il signe ici un film déjanté, se concentrant sur l’étude de personnages fascinants, utilisant ses propres éléments pour rendre le film hors du commun. Critique et analyse en entier en lien.