Guy Moshe, après son pas terrible Holly, nous revient après avoir fait une étude de marché très poussée. Pour cartonner il faut du neo-noir façon Sin City, des katanas façon Sucker Punch, et imposer une esthétique particulière pour tenter d’avoir l’air neuf comme l’était le film de Rodriguez ou le 300 de Snyder. Manque de bol il a enrôlé Ron Perlman, signe distinctif du nanar (même si on l’aime), ainsi que Josh Hartnett, qui plaisait aux filles, mais y’a 10 ans, et son esthétique est tout, sauf esthétique. On dit que les goûts et couleurs, tout ça, mais on se croirait devant un spectacle créé pour provoquer des crises d’épilepsie, même chez les gens n’y étant pas sensibles. On a toutes les couleurs possibles affichées en même temps, de façon à faire graphic-novel, oui mais QUELLE graphic-novel ? Si on voyait ça sur le papier on serait tenté de penser qu’un mec a gerbé dessus. Enfin bon, passons cette faute de goût, car la nullité ne s’arrête pas là, le montage est quant à lui mou, et les scènes de conversations servies par un Woody Harrelson neurasthénique sont aussi chiantes que les combats qu’enchaînent Hartnett et son acolyte Gackt. Le film était vu pour être un bunraku (théâtre de marionnettes) mais il est bien plus proche du kamishibai géant (théâtre de papier Japonais), et si l’effet fonctionne par moment (durant l’intro et quelques passages transitoires), il se montre très vite rébarbatif. Le kamishibai ne dure pas deux heures, or ici c’est le cas, et qui plus est l’histoire (allègrement pompée sur Le garde du corps d’Akira Kurosawa) n’offre que des scènes de parlotes tentant de singer du Tarantino et des scènes d’action molles comme un plug anal.
Bref, Bunraku est un foirade totale, une insulte au cinéma et à la culture traditionnelle nippone, et ce sur tous les points. Moshe se masturbe avec son effet marionnettes/cocottes et quand il tente d’imposer une idée, elle est encore empruntée à autre chose (la scène de combat en side-scroll façon Viewtiful Joe rappelle celle d’Old Boy, à la seule différence que des effets sonores façon Atari 2600 ont été rajoutés par dessus, histoire de bouffer au râtelier Scott Pilgrim). Peut-être que le film se voulait être un exercice de style visant à démontrer que le mélange de styles ne donne rien de bon; manque de bol Snyder l’avait déjà fait avec Sucker Punch, mais en revanche Sngmoo Lee avait prouvé le contraire avec The Warrior’s Way. Le mélange de styles est donc possible, il suffit simplement d’avoir un peu de talent et savoir comment organiser la chose de façon à ce que ça ne ressemble pas à un sandwich au caca.
On aurait préféré être torturé plutôt que de revoir The Spirit, mais après cette production on aurait préféré le revoir que se taper cette daube.
Les acteurs, la plupart has-been (ou habitués au productions de secondes zones) ont visiblement eu l’air de se rendre compte du non-sens de l’oeuvre, et ont servi des interprétations plates (Perlman est tellement dépité qu’il bouffe sa soupe avec ses dreads qui trempent dedans, et le reste du temps il cause avec sur la tronche un chapeau en forme de chips à la pomme).
La morale de l’histoire sera qu’un bon film typé graphic-novel n’offre à Josh Hartnett qu’un maigre temps à l’écran, alors qu’à l’inverse une merde le met en tête d’affiche (ce qui n’augure rien de bon pour le reste de sa « carrière »).
Pour conclure, si vous aimez les films ressemblants à une boîte de nuit façon Tech Noir vous plaisent, foncez. Ceux qui espéraient de ce vomi visuel un nanar distrayant comme Batman et Robin déchanteront très vite, ça parle (beaucoup), ça se prend au sérieux, et ça se croit intelligent, mais c’est juste con.
Mention spéciale pour le temps extrêmement court qu’il y aura fallu pour que le métrage soit distribué par chez nous. Et dire qu’il y a des bons films qui mettent des années à sortir, ça fait mal aux burnes…