La pureté d'une jeune demoiselle et le vécu d'une femme mûre. Une blondeur éclatante, mais un début de pâleur et des traits grâcieux qui se tirent : c'est le visage, magnifique, de Michelle Pfeiffer, que Stephen Frears nous fait redécouvrir dans ce Chéri, adaptation réussie des romans de Colette du même nom. Un visage mis en valeur, diaphane, mais parfois éclairé dans sa nudité, portant inévitablement les marques du temps. Frears, le grand cinéaste anglais (Les Liaisons Dangereuses, The Quenn, Les Arnaqueurs... la liste est longue), lui a offert l'un des plus beaux rôles de sa carrière, un rôle où elle peut donner toute sa mesure d'actrice : celui de Léa de Lonval, courtisane proche de la cinquantaine, qui s'amourache d'un jeune aristocrate, surnommé "Chéri", dans la folle France de la Belle Epoque. Adapté d'un roman de Colette, le scénario de Hampton condense son histoire en un film de 1h30, alerte, rapide, qui en serait presque léger. Les fines notes d'Alexandre Desplat et la mise en scène extrêmement fluide de Stephen Frears confirment cette impression (piégeuse) d'assister à un ''petit'' film d'époque agréable et sucré, dont l'intrigue nous happe sans problèmes. L'ouverture ludique, au son d'une voix off entraînante et distanciée, où défilent en quelques minutes les figures des grandes courtisanes du XIXe siècle, est la fausse annonce d'un conte qui débute – mais le conte cache toujours autre chose : déjà se devinent les indices du temps qui passe, de la fin du monde aristocratique, rattrapé et supplanté par la modernité, un monde mort qui a déjà ses légendes. Démarré sur un ton désinvolte, le film bascule progressivement dans le drame pur, la tragédie, dont la fatalité est la fuite implacable du temps et les pièges d'une société aristocratique artificielle.
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