c'est un film très intéressant sur plusieurs aspects qui mérite d'être vu. D'abord, il est traité comme un conte ce qui permet à la fois au réalisateur de s'affranchir de certains poncifs du biopic et d'à la fois faire éclater une part d'imaginaire qui est très riche chez lui. A chacun d'apprécier. Ensuite le travail des acteurs est vraiment spectaculaire, la performance d'Eric Elmosnino est bluffante, Gainsbourg revit, il est là avec nous pendant 2h, la grande réussite du film c'est lui. Et il ne tourne pas à vide car les seconds rôles sont particulièrement percutants, avec notamment Laetitia Casta, magnifique en Brigitte Bardot, Lucy Gordon émouvante et tout à fait juste et Sara Forestier assez hilarante en France Gall, mais il y en a d'autres. Ces acteurs nous offrent des scènes savoureuses et souvent puissantes qui valent le coup d'oeil, le tout rythmé par les notes et mélodies de Serge, habilement introduites dans l'histoire, ni trop ni pas assez, tout juste ce qu'il faut. Ce qu'on peut reprocher à Joann Sfar, c'est de ne pas avoir su clore son film: après un dernier quart d'heure qui perd un peu en intensité, j'ai eu l'impression qu'il avait peiné à trouver une porte de sortie à la hauteur de ce qu'il nous avait conté précédemment, d'où cette sensation de fin un peu languissante puis tronquée, c'est mon seul regret. En conclusion je dirai que c'est un très beau film qui vaut le coup d'oeil
Malgré sous statut d’artiste majeur du 20e siècle, la vie de Serge Gainsbourg n’avait toujours pas eu les honneurs du grand écran. C’est désormais chose faite mais force est de constater que le film est loin d’être irréprochable. Certes, on ne peut qu’applaudir le talent de mimétisme des acteurs, à commencer par Eric Elmosino (sans doute futur Césarisé) qui retranscrit parfaitement les tics si reconnaissables du chanteur (son regard, sa moue, sa façon de fumer…) tout en apportant une vraie épaisseur à son personnage à la fois drôle et tragique. Une interprétation époustouflante transcendée par des 2nds rôles tout aussi épatants (voir Laetitia Casta en Brigitte Bardot ou Lucy Gordon en Jane Birkin) même s’ils souffrent souvent d’un manque de présent à l’écran (Anna Mouglalis en Juliette Gréco, Sara Forestier en France Gall ou Mylène Jampanoï en Bambou auraient pu être davantage développées). Mais le premier couac vient du parti-pris de refuser le biopic classique au profit d’un conte fantasmé, ce qui aurait pu être une merveilleuse idée entre les mains d’un metteur en scène de talent… ce que Joan Sfar n’est pas ! On assiste ainsi à une succession de "moments-clés" (son enfance sous l’Occupation, ses rencontres professionnelles, ses amours…) sans véritable fil conducteur et alourdies par un traitement souvent maladroit (le chat qui parle, l’omniprésence de La Gueule…) voire dérangeant (la grosse marionnette du début, le délire sur l’Homme à tête de choux…). Autre regret : l’absence de certaines scènes "indispensables" telles que le billet de 500 francs brulé ou le "I want to fuck her" à Whitney Houston (la relation de Gainsbourg avec les médias est d’ailleurs absente du film). Reste une œuvre atypique bercée par les tubes légendaires de Gainsbourg mais qui aurait mérité un traitement moins onirique et un développement sur deux films (un dytique "Gainsbourg/Gainsbarre" me semble indispensable).