Décidément, DC Comics est à la traîne en matière de cinéma : un seul film en 2013 et un film Batman vs Superman en 2016, et il faudra attendre 2018 pour avoir enfin un film Justice League qui servira de base à la création d'un univers cinématographique DC. Mais pour égayer notre attente, parlons d'un film Batman moins connu : le film d'animation Batman contre le fantôme masqué.
Ce film fait partie intégrante de la fameuse série Batman the animated series, série animée culte des années 1990. Cette série ne devait être qu'un projet hyper-commercial, une sorte de continuation du film Batman de Tim Burton de 1989 (un peu comme Avengers : Earth's mightiest heroes). Mais, grâce à ses personnages attachants, son esthétique entre le film noir et l'art déco, son character design simple et efficace, et son atmosphère sombre frisant le gothique, et des acteurs qui se prennent au sérieux, elle a réussi à s'imposer comme une série unique en son genre. Elle reste pour moi la meilleure adaptation de Batman à ce jour et une de mes séries préférées.
Et Batman contre le fantôme masqué garde toutes les qualités de la série, mais transposée au cinéma. Car oui, il s'agit bien d'un film Batman : il a fait une sortie discrète au cinéma aux USA. Mais ce fut un échec, si bien que depuis, les films de l'univers animé DC sont sortis directement en VHS puis en DVD. Mais en tout cas, il s'agit bien d'un film Batman, ce qui me donne un excellent prétexte pour en parler !
L'histoire est simple : Des membres éminents de la mafia Gothamite (Sisi, c'est comme ça qu'on appelle les habitants de Gotham!) se font éliminer par un étrange personnage appelé le « fantôme » (phantasm) (Stacy Keach/Olivier Proust). Les soupçons de la police, et du conseiller Arthur Reeves (Hart Bochner/Pierre-François Pistorio), se portent sur Batman (Kevin Conroy/Richard Darbois), qui mène donc l'enquête sur ce fameux fantôme. Mais il apprend que son ancien amour, Andrea Beaumont (Dana Delany/Régine Teyssot), revient à Gotham après dix ans d'absence, et sort avec Arthur Reeves. Cela fait remonter en lui des souvenirs du temps où, alors que l'idée de devenir Batman lui trottait déjà dans la tête, il avait la possibilité d'être heureux avec Andrea. Il l'avait même demandé en mariage, mais Andrea lui avait renvoyé la bague, car son père(Stacy Keach/Claude Giraud) devait beaucoup d'argent à la bande de Salvatore Valestra, et il a dû s'enfuir en Europe avec Andrea. C'est à la suite de cette déconfiture que Bruce Wayne avait décidé de devenir Batman.
Dans le présent, la situation se complique, car le vieux Valestra s'est rendu compte que le fantôme en veut à son ancien gang. Persuadé d'avoir affaire à Batman, il fait donc appel au Joker (les flamboyants Mark Hamill et Pierre Hatet) pour s'en débarrasser.
Ça va, vous suivez ?
Ce film est plutôt dense, comme on peut le voir : on s'intéresse à la fois à l'origine de Batman et à une intrigue policière intéressante. On voit à quel point Bruce Wayne avait la possibilité d'être heureux, t donc la force du dilemme entre son amour pour Andrea et la fidélité à son serment. Et même s'il a fait son choix, il garde en lui une part d'espoir : il sait qu'il a toujours la possibilité d'être heureux. C'est pour moi ce qui fait la force de ce personnage dans la série animée et dans ce film : malgré la perte de ses illusions, il n'est pas aigri, il reste positif. C'est le genre de personne qui s'attend au pire, mais continue d'espérer le meilleur.
Le thème des illusions perdues est très bien traité dans ce film. En effet, Bruce et Andrea visitent l'exposition internationale de Gotham, et notamment un pavillon appelé « House of the future », montrant une idée utopique de la Gotham de demain. Dix ans plus tard, ce pavillon est désaffecté, et le Joker y a élu domicile. Bien entendu, ce pavillon représente les illusions de la jeunesse, que les années et l'expérience effacent peu à peu. Je trouve très parlant que le Joker habite dans cette exposition et se serve des éléments de celle-ci comme armes, comme s'il se nourrissait des illusions perdues de Batman.
Les comédiens de doublage sont à couper le souffle : bien sûr, les voix classiques de la série, Kevin Conroy, Mark Hamill, Efrem Zimbalist Jr (Alfred), Bob Hastings (le commissaire Gordon) sont égales à elles-mêmes. Mais les nouveaux venus se débrouillent eux aussi très bien. Mention spécials à Dana Delany, qui fit une telle impression qu'Andrea Romano la choisira plus tard pour doubler Lois Lane dans Superman l'ange de Métropolis.
La VF n'a rien à envier à la VO : si le jeu d'acteur laisse parfois à désirer, les comédiens français restent très justes et remplacent parfaitement leurs homologues américains. Mention spéciale à Pierre Hatet en Joker, qui s'en sort avec brio dans la tâche difficile de remplacer Mark Hamill.
Batman Mask of the Phantasm est donc un excellent film, que je recommande à n'importe-qui, fan de Batman ou non. Pour moi, non seulement il égale en qualité la trilogie Dark Knight de Christopher Nolan, mais il met encore plus en valeur le personnage et l'univers de Batman. Un vrai petit chef d'oeuvre.