Une jeune femme se retrouve au centre du conflit politique et affectif qui oppose deux hommes, anciens amis, dont l’un perpétue un attentat d’extrême droite. Ou comment l’engagement politique se mue en politique des sentiments. Même si on retrouve ici l’envie de faire co-exister la petite et la grande histoire (l’amour qu’on trahit, celui qui éclot et les déchirements d’une France sur fond de guerre d’Algérie), il s’agit ici avant tout de résistance : celle d’une femme pour affirmer son désir, d’un homme pour sortir de son retranchement du monde (le beau personnage de Serge, humaniste un peu trop en retrait) ou d’un autre contre le dégoût que lui inspire le monde (et qui prend la forme du mauvais combat). Résistance surtout contre la trahison, celle de ses idéaux, d’une idée de l’amitié ou de l’engagement amoureux. Mais rien n’est cependant univoque dans ce beau film sur l’entre-deux, sur le vacillement. S’esquisse aussi le portrait en demi-teinte d’une France déchirée par deux guerres fratricides : celle de 39/45, avec sa culpabilité, et celle d’Algérie, contemporaine du film, qui vient réveiller de vieux réflexes fascistes. Film politique, mais « par la bande », qui ose faire cohabiter intimisme et théorique, dans un geste tantôt brusque tantôt subtil, qui ne se donne jamais vraiment – c’est aussi sa limite tant le propos peut paraître parfois un peu nébuleux. Car on pourrait tout autant dire que le film parle de la trahison (entre un disciple et son mentor, entre deux anciens amis, au sein d’un couple) comme la pire des violences… Les thématiques, on le voit, sont riches est complexes, audacieusement équivoques. La mise en scène de Cavalier sait insuffler un rythme soutenu à ce thriller intimiste, la superbe photo en noir&blanc de Pierre Lhomme magnifie un casting de rêve et une Romy Schneider lumineuse trouve son premier grand rôle, qui annonce celui de « César et Rosalie ». « Le Combat dans l’île » ne manque pas de charme et d’atouts. On peut juste regretter que le propos reste un peu trop théorique pour provoquer un vrai trouble (à l’image de certains dialogues, un tantinet artificiels). Quoiqu’il en soit, le film n’a pas vieilli et demeure toujours aussi passionnant.