Holy Rollers traite d'un sujet assez méconnu, à savoir le trafic de drogue entre l'Europe et l'Amérique, qui a atteint son apogée dans les années 90. Des centaines de juifs orthodoxes enchaînent les allers-retours entre les deux continents, embarqués dans une boucle infernale, livrant leurs marchandises et touchant leur argent, sans s'attirer les moindres soupçons.
Sam, élevé dans la tradition religieuse la plus pure par ses parents, voit son avenir prédéterminé. Il va devenir rabbin et son mariage avec une fille qu'il ne connait pas est déjà planifié. Mais lui semble vouloir plus, il ne comprend pas le manque d'ambitions de son père et rêve de pouvoir s'offrir ce qu'il n'a jamais pu s'acheter. C'est en découvrant ce "business" rentable qu'il va se lier d'amitié avec le frère de son meilleur ami, Yosef. D'abord réticent quand il découvre la nature et l'illégalité de ce trafic, il va se laisser convaincre par Yosef et son associé, Jackie, afin de continuer à travailler pour eux.
C'est donc l'évolution d'un jeune homme en plein doute qui nous est dévoilée. Un esprit torturé entre ses propres désirs et ce qu'il juge, ou pense juger, comme étant le bien. Il finit par s'éloigner progressivement de sa famille et gagne une place plus importante dans ce banditisme international. Sous le charme de Rachel, la petite amie de Jackie, il se laisse porter au milieu de ces nuits new-yorkaises et hollandaises, où il se sent plus puissant que jamais, où il pense avoir enfin trouvé sa place.
Car ce que représente Kevin Asch avec son long-métrage, c'est l'incertitude d'un jeune homme en quête d'identité, qui ne situe plus la réalité, et qui semble presque jouer un jeu, sans se rendre compte de son rôle insignifiant de simple pion. Observant cet univers à travers l'oeil d'un Jesse Eisenberg troublé et troublant, nous ne percevons que la partie immergée de l'iceberg. Comme lui, nous sommes plongés dans ce cercle vicieux avant que l'on ait pu réaliser à quel point il est malsain, et qu'il est trop tard pour revenir en arrière.
Une opposition se met en place, du début à la fin, entre la religion et le banditisme, à travers une métaphore bien trouvée. Constante évocation du bien et du mal, du noir et du blanc, il n'y a alors de l'objectivité à aucun moment. Chaque personnage est enfermé dans une cage, et de nuances il n'y a point. Les relations humaines ne sont pas aussi poussées qu'elles auraient pu l'être, et l'étude de ce phénomène n'est dévoilé que de manière primaire, avec un manque regrettable d'approfondissement. Seul le personnage principal semble être exploité comme il se doit, ce qui justifie une durée relativement courte, comme si on n'ose pas creuser dans ce contexte social qui s'avère pourtant intéressant.
Holy Rollers bénéficie d'une atmosphère bien particulière, mais qui ne tire pas profit de toutes les possibilités offertes, comme un signe de frilosité apparente. Le point de vue est unilatéral et n'offre que peu de perspectives, enlisé dans une sorte de morale bien trop lisse. Les acteurs créent le rythme à eux-seuls, ne s'auto-suffisant pas pour rendre l'oeuvre marquante ou passionnante, mais tout juste passable.