La seconde Palme d'Or attribuée à Emir Kusturica ne m'a pas tant emballé que ça (enfin, tout est relatif), la faute notamment à une dernière demie-heure complètement inutile. Pourtant, malgré ses nombreux et visibles défauts, j'ai envie de dire que ce film vaut plus que le simple détour. Rares sont les réalisateurs possédant une marque personnelle, ayant apporté leur (minuscule) pierre à l'édifice en imposant un ton original à défaut d'être révolutionnaire (les oeuvres qui ont chamboulé le paysage cinématographique se comptent sur les doigts d'une main). Cette remarque s'applique encore plus aux productions contemporaines, plus moribondes et conformistes que jamais. Aujourd'hui existent différents styles pour différents publics, chose que l'on pourra retrouver dans la musique et qui contribue à formater un peu plus les gens. Pour les adeptes de la pop, ce sera ça. Pour ceux qui aiment le décalé, ça. Le trash, c'est ça et pas autrement. L'industrialisation a gagné tous les terrains, si bien que depuis les années 80, les auteurs les plus talentueux sont en général ceux s'étant distingués dans le contexte du genre auquel on prête moins d'attention puisqu'il a été recyclé des dizaines de fois. Et pourtant... Le cinéma d'auteur est plus carré que jamais. Aussi, lorsque je vois surgir un hurluberlu plein d'humour et raffolant de n'importe quoi, détestant la contemplation et les temps morts, adepte d'un cinéma certes grand public mais vivant, qu'il rythme avec un brio indéniable ses créations et propose quelque chose de correct esthétiquement (variation importante de plans, montage soutenu dans le bon sens du terme, photo reconnaissable, musique indétrônable...), je me prends au jeu. Après, peu m'importe son côté mélo limite cucu, sa surabondance de grands sentiments, son manque de tact quant à l'approfondissement du caractère des personnages, son côté je "m'adresse à tout le monde quitte à ne pas y aller avec le dos de la cuillère"... Ca reste personnel et plaisant.