Quand on a vu le sujet du film (en gros, les rapports entre Freud, le père de la psychanalyse, et Jung, un de ses disciples, à une étape importante de sa vie professionnelle [il recherche de nouvelles voies pour développer sa discipline] et personnelle [sa femme attend leur premier enfant et il rencontre une autre femme, une de ses patientes]) et qu'on a su quel réalisateur devait s'y coller (David Cronenberg), on était en droit d'attendre ni plus ni moins qu'un chef-d'œuvre (souvenez vous de "Faux-Semblants", quoi !).
Las, si on a bien droit au propos assez stimulant intellectuellement promis par le sujet (même s'il est survolé, on a en tous cas envie d'en savoir plus en sortant de la salle), le film est chiant comme la mort sur la forme : on empile les scènes de dialogues à deux ou trois personnages maximum et, entre chacune de ces scènes, on nous lit la correspondance des protagonistes. Et alors là, quelle inventivité dans la réalisation : je lis une lettre donc, un coup on me filme en train de l'écrire, un coup on filme le destinataire en train de la lire ! Alors ouais, pour le fun, on nous met une ou deux scènes d'hystérie ou de fessée par ci par là et puis, comble du comble, on nous décrit des rêves au lieu de nous les montrer (on est au cinéma, merde !). Un peu comme le personnage de Freud dans le film qui refuse de parler de ses rêves par crainte de perdre son autorité et de tomber de son piédestal, on a l'impression que Cronenberg a peur de se laisser complètement aller avec son sujet.
Bon, il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'une adaptation d'une pièce de théâtre, exercice souvent casse-gueule, mais on était quand même en droit d'attendre beaucoup mieux de la part de Cronenberg. Même d'un Cronenberg croulant... Ah, imaginez ce qu'un tel film aurait donné dans les mains d'un David Cronenberg plus jeune (période "La Mouche"/"Faux-Semblants", par exemple) ou d'un Ken Russell qui vient hélas de nous quitter !
Côté acteurs, pas grand chose à redire : Michael Fassbender est parfait (on commence à en avoir l'habitude), Viggo Mortensen et Vincent Cassel font le minimum syndical (normal pour Cassel, deux scènes et puis s'en va, un peu plus décevant pour Mortensen) mais on est quand même un peu gêné devant les convulsions et les bégaiements de Keira Knightley tout en Actors Studio du pauvre (c'est peut-être cette méthode-là qui est dangereuse, en fin de compte !).
Voilà, "A Dangerous Method" n'est pas tout a fait un mauvais film mais il s'agit sans doute de la plus grosse déception de la fin de l'année 2011.