Voilà le film qui, avec Séraphine, relève la morne production de l'automne constellée de comédies poussives tournées par des réalisateurs émérites fatigués. Marco (le prodigieux petit Marco Roblès) s'est enfui de chez sa famille d'accueil, en grande partie pour revoir sa grand-mère, mourante. Il rejoint un camp de roms sédentarisés, mélange de bicoques et de caravanes en bordure de l'autoroute. Il y a chez le petit garçon une terrible demande d'amour, mais personne ne veut vraiment de lui. Ni son père, infatigable coureur occupé par sa nouvelle compagne (l'excellent Simon Abkarian dans un registre plutôt inhabituel). Ni sa belle-mère -il est vrai qu'il a été placé pour avoir mis le feu à sa caravane....Ni le reste de la communauté car par sa mère, Marco est bicot (voilà un mot qui, dans les autres milieux, a disparu du vocabulaire raciste....). Il a toujours, autour du cou (même pour la messe d'enterrement de la grand-mère...) sa main de Fatma, seule chose à laquelle il tienne vraiment. Il lui reste un cousin, ado nain et malade qui rêve de faire fortune avec un coq de combat. Et les copains. Un petit cousin mais aussi Rachid, l'arabe qui travaille pour des recéleurs et entraîne dans la délinquance les deux petits, évidemment les mômes maladroits vont rapidement se faire prendre, parler, et tout ça finira très, très mal, pour Rachid, et aussi, différemment, pour Marco qui rêvait pourtant de s'en sortir, d'abandonner la chourave, de devenir boulanger pâtissier.
Voilà un film sur les gitans ni folklo, ni musical, ce sont bien ceux de chez nous décrits à la fois avec empathie et avec justesse: comment une communauté qui aime tant ses enfants peut elle, par ailleurs, les laisser livrés à eux même, abandonnés au pire? Qui dit des choses intéressantes sur les rapports entre roms et arabes, qui partagent les mêmes quartiers de misère sans s'aimer. Karim Dridi, qui n'avait pas toujours convaincu, signe là une oeuvre magnifique.