On se méfiait de Tony Gilroy après le supplice infligé par "Michael Clayton" , étalage opportuniste d'un cinéma dit 'engagé' et consciencieux dans sa prosternation post-11 Septembre. Mais "Duplicity" se présentant comme une simple comédie d'espionnage à divertissement, soutenue par Julia Roberts (le seul évènement du film), on se dit qu'après tout, le plaisir n'est pas loin. Partant sur un sujet très proche du drôlissime "Mr. & Mrs. Smith" , ce sous-spectacle figé est en fait l'escroquerie de l'année, une comédie poussive et niaise, bien loin des dialogues piquants tant attendus et du cynisme ambiant. A travers la légèreté de son sujet, Gilroy brode avec prétention un récit incompréhensible, troué de flashs-backs, de répétitions, de grandes villes (Londres, Zurich, Dubaï, Rome, etc...), et oublie de faire du cinéma ; sa mise en scène toc et amateur laisse des tunnels de dialogues mielleux flotter dans le vide durant 2h. Et ce n'est pas l'utilisation insistante de split-screen ou de jazz qui rythment un instant ce récit inutilement tortueux. La comédie, à la base absolument pas drôle, finit même par prendre la tête ; chaque séquence se ressemble, immobile, identique à la précédente, interminable, alors que le scénario continue, débauche toutes ses mauvaises idées de désamorçage dans la temporalité jusqu'à nous assommer d'ennui. Même le duo d'acteurs est pathétique ; Clive Owen est aussi endormi que d'habitude, et Julia Roberts totalement déconfite par une chirurgie esthétique qui l'abîme de plus en plus. On aurait aimé un face-à-face électrique et cinglant, nous voilà face à un film paresseux, l'un des plus exténuants qui soit, à la fois bête et d'une longueur cauchemardesque. On ne sauvera de ce flamboyant naufrage que le générique d'ouverture au ralenti, sur la piste de décollage d'un aéroport, seul moment où Paul Giamatti nous fait rire. Le reste n'est que pathétisme et arnaque sur un prétendu divertissement.