Quatre ans après le corrosif « 99 francs », que penser du retour de Frédéric Beigbeder sur le grand écran ? Il mérite un trois. Oui, la note est dans le titre. Il y a quelques bons éléments, quelques étincelles de talent qui jaillissent de temps en temps dans la mise en scène, mais hormis cela, dans « L’amour dure trois ans », le ton acerbe de Beigbeder perd de sa superbe. L’histoire qui est présentée est presque trop gentille. Il aime une fille, la courtise, elle tombe dans ses bras, ils se disputent, se séparent et retournent ensemble pour la vie. Classique non ? Ce qui aurait pu être la trame du film est dévoilé dès les premières minutes. L’introduction se fait tout en douceur, sur la belle voix d’Ellie Goulding et de sa ballade intitulée "Your song". Beigbeder choisit de montrer les différentes phases de l’amour. Le bonheur du couple formé par Marc et Anne, jusqu’à leur séparation. Eh oui, l’amour ne dure que trois ans. Comme je le disais un peu plus haut, certains plans du film sont agréables et différents. Le travelling dans l’appartement de Marc où différentes versions de lui-même sont à la recherche de l’inspiration ou bien le listing des lieux ayant (ou non) été visités au Pays Basque en sont de bons exemples. Mais ces éclairs de talent ne sont pas majoritaires. La mise en scène est globalement classique. Le héros a lui le mérite de sortir de la masse. Pour le meilleur comme pour le pire. D’un côté, on ne peut qu’apprécier son anticonformisme, sa niaiserie et sa manie de parler directement au spectateur, qui en font un personnage digne d’intérêt. D’un autre côté, choisir Gaspard Proust pour lui prêter ses traits était une idée on ne peut plus mauvaise. L’acteur a de sérieux problèmes de diction, il peine à jouer avec sa voix. Du coup, il ne véhicule aucune émotion, et cela entraîne de l’agacement de la part du spectateur. Les faiblesses de Marc sont intéressantes mais deviennent rapidement pénibles. Quel est donc ce héros mauviette qui n’assume ni ses choix ni ses envies ? Que lui trouve-t-il à elle, vulgaire et désagréable ? Mais que quelqu’un le secoue pour en faire un vrai homme ! Nous ne sommes malheureusement pas mieux lotis en matière de personnages secondaires. Les amis de Marc sont insupportables. Jonathan Lambert et sa belle Frédérique Bel ne sont jamais amusants, Joey Starr encore moins. L’ami dragueur lambda, jusqu’à son
vrai-faux coming-out
absolument pas crédible... Les seuls que j’ai apprécié voir sont Marc Levy, qui joue malicieusement avec son image, et l’excellente Valérie Lemercier. Beigbeder, Louise Bourgouin, Frédérique Bel, Jonathan Lambert... Il flotte comme un parfum de Canal dans cette production. Si jamais vous ne l’aviez pas compris, une interview tirée du Grand journal s’est glissée dans le film. D’ailleurs, c‘est cette même interview qui déclenchera le dénouement de « L’amour dure trois ans ». La dernière scène ne m’a pas plus plu que le pire couple de l’année réuni au cinéma (Proust/Bourgouin si vous n’aviez pas compris). La fin imaginée par Beigbeder est trop propre.
Le coup de la vague s’apprêtant à déferler sur les héros est amusant, mais n’empêche pas que
ce happy-end est ennuyant. J’en attendais plus.
Beigbeder n’a donc rien de plus sous son chapeau que au pire : un couple heureux jusqu’à la fin des temps ; au mieux : un amour brisé au bout de trois ans par une catastrophe naturelle ? Non et puis sérieusement, c’est un peu trop facile de voir Alice abandonner toute sa vie au bout de trois ans de vie commune avec l’horrible Nicolas Bedos pour simplement rejoindre Marc à l’autre bout du monde...
Si le film n’avait absolument rien en commun avec « 99 francs », il serait moyen. Pas de chance, les deux ont en commun leur auteur. Fréderic Beigbeder est capable d’écrire une histoire d’amour bien plus palpitante et plus osée que celle-ci, j’en suis sûre.