On est dans la guerre d'Irak: mais on est partout. Chez les marines d'abord, pauvres types qui ont plus de biceps que de cervelle et qu'on a complètement drogués de propagande -côté soleil: vous allez défendre votre beau pays, la justice et la liberté; côté ombre: massacrez tous ces salopards. Chez les terroristes ensuite, décrits avec beaucoup de finesse, voire d'indulgence. Car l'aîné des deux poseurs de bombe n'est pas exactement un exalté; il se méfie d'Al-Quaïda; il pense juste faire un acte politique en faisant exploser un tank US. Enfin, chez la population, apeurée et passive, déchirée entre deux camps: ils ont vu la bombe, sans doute faudrait-il prévenir les américains. Avec une forte probabilité que les moudjahiddins rappliquent et massacrent tout le monde. Et nous, spectateurs, assistons impuissants à cet engrenage implacable qui va conduire au désastre. Le tank explose; un marine est coupé en deux; les autres dans un paroxysme de violence aveugle, vengeance et panique mêlées, vont tuer tout ce qui bouge dans les maisons voisines : des femmes, des enfants et des vieillards. Enfin, on est sur un dernier plan, au QG militaire où les gradés suivent avec une extrême précision les opérations - merveilleuse technologie moderne! Lors de ce type d'attentat déclenché par un portable, tout le monde est suspect dans le voisinage. Ordres: kill them all! Cette épouvantable "bavure" serait restée ignorée, et ses responsables impunis, sans une vidéo tournée par les terroristes et envoyée aux chaînes de télévision… merveilleuse technologie moderne. Les caporaux seront jugés pour crime de guerre, par le colonel même présent au QG pendant le massacre. A cette figure militaire répond, symétrique, celle du Cheihk, satisfait lui aussi de l’hécatombe d'innocents (non: de martyrs !) qui va galvaniser la population et initier de nouveaux moudjahiddins.
Interprété en Jordanie par des irakiens en exil et des anciens d’Irak, ce film est fort, intelligent, indispensable.