Il y aurait de quoi penser à la fin du film que le sujet ne se démarque pas vraiment, qu'il reste enlisé dans une prise de risques quasi-nulle et qu'il ne tire du combat politique que quelques aspects peu attractifs. Et pourtant, c'est tout l'inverse, et cette puissance qu'arrive à proférer le film sur le spectateur se démarque par deux points primordiaux : La mise en scène et le casting.
Inspiré, c'est par ce mot que l'on pourrait au mieux résumer l'esthétisme du film : Que ce soit dans le maniement du cadre, dans le choix des échelles de plans, dans l'agencement musique/image, dans la puissance accordée au non-dit ou dans le choix des décors. Tout est mis en place d'une manière exemplaire pour laisser éclater sur le devant de la scène la pénombre des dessous de campagne, pour mettre en lumière ce qui reste habituellement dans l'ombre.
Et c'est en mélangeant avec habileté la froideur des cadres et des apparences à une force intimiste et personnelle, que l'on retrouve dans chaque situation un amas de sentiments contraires, qui fonctionnent ensembles, liés par l'histoire présentée, qui joue aussi sur cette double facette, officielle et personnelle, froide et chaude. Finalement, on est aussi éloignés des personnages que nous en sommes proches, on subit nous-mêmes, en tant que spectateur omniscient, cette confusion des sentiments. Nous ne savons plus quoi vouloir, et pourtant nous nous laissons entraînés dans cette course auto-destructrice, qui nous laisse un goût amer proche du dépit, mais qui nous force à reconnaître la puissance du scénario.
Un thriller au genre particulier, qui garde cette puissance caractéristique de nous rendre actif tout au long du film. Les scènes deviennent toujours plus intenses, nous plongeant encore plus au coeur de cette lutte pour le pouvoir, de ce bras de fer constant, où chaque erreur peut s'avérer fatale. Un mélange de film d'espionnage, de comédie, de romance, d'extraits politiques, et un rythme qui ne cesse de monter en cadence, mis en valeur par ce casting parfait. Ryan Gosling en tête de liste, évidemment, mais ce n'est pas le seul, et du gouverneur jusqu'à la journaliste en passant par Thompson, ils s'avèrent tous comme les piliers d'une réussite à plusieurs niveaux.
Il y a aussi ce désir de faire comprendre les choses par un procédé d'assimilation, qui flatte le spectateur, comme s'il était mis dans la confidence. George Clooney valorise son public, il ne le prend pas pour un récepteur idiot, à qui on explique tout de manière barbare et fade, et on l'en remercie. Tout comme on le remercie d'utiliser ses gros plans, symboles d'isolement de certains personnages durant des situations clés, pour faire ressortir encore plus aisément les sentiments. Il n'y a pas besoin de paroles pour les décrire, et la fin du long-métrage justifie de la meilleure des manières cette idée.
- À défaut de pouvoir monter les marches du pouvoir, on monte les marches de la jouissance filmique, et c'est déjà pas mal. -