Depuis une grosse dizaine d'années, on a vu quelques fois Kassovitz devant la caméra, où il se débrouillait très bien. Derrière, en revanche... no comment. Avec "L'Ordre et la morale", il vient nous rappeler qu'il fut, dans les années 90, un jeune réalisateur prometteur. De fait, voilà probablement son meilleur film. La polémique autour de ce dernier était probablement inévitable, sachant que nous sommes dans un pays où dès qu'on ouvre un peu trop sa gueule, on est stigmatisé. Et je suis loin d'être toujours d'accord avec les déclarations parfois stupides de Kassovitz. Mais ici, pourquoi hurler au scandale ? Parce qu'il vient rappeler des heures peu glorieuses, qui plus est récentes, de notre Histoire ? Qu'il rappelle, au passage, que la France est toujours un pays colonialiste ? Sur le fond, le film était profondément nécessaire, et Kassovitz était sûrement le seul réalisateur français à avoir les "cojones" pour le faire. Dans ses interviews comme dans ses films, il est direct, franc, agressif, et ça fait du bien. Et, en plus, il se débrouille très bien derrière la caméra. Le flash-back de l'attaque de la gendarmerie est tourné de manière inventive, la lumière est toujours aussi bien travaillée, et la séquence de l'assaut est d'un réalisme digne des meilleurs films de guerre. De l'intelligence et du talent, c'est ce qu'il faut pour faire du bon cinéma politique français. Entre "L'ordre et la morale" et "L'exercice de l'Etat", on est plutôt bien servis en France ces dernières semaines.