LA TRADITION DU MEURTRE : Mathieu Kassovitz prend un parti-pris très fort et s'engage corps et âme dans et pour son film : c'est louable, respectable et ça se ressent, difficile de rester spectateur indifférent et de ne pas s'immerger dans l'affaire. Le scénario est orienté vers une vérité ( peut-être est-elle celle qui domine, peut-être que tout est faux ) mais c'est donc en partant de cette vérité ( très vraisemblable il faut le dire ) que nous devons juger le film. En gros, alors que les négociations avançaient en vu de libérer les otages et de trouver une issue pacifiste, les hautes autorités ( la belle formule ) et notamment ce 'Bernard Pons' ( le personnage agace, énerve, on lui logerait volontiers une bonne douzaine de balle dans le tête ) qui ordonne l'assaut, au risque de s'ouvrir à un massacre, dont tout le monde se fout évidemment à quelques jours des élections : ça mérite bien quelques morts de plus les élections, c'est nettement moins drôle autrement. Et puis quelques Kanaks tués, qui s'en soucie ? C'est là que le propos du film devient intéressant, percutant et incisif, profondément iconoclasme même : cette critique de la hiérarchie, de l'abus de pouvoir, des ressors secrets que nous ne connaissons jamais, de la cruauté de l'Homme, du système faussement démocratique, des sommités politiques, de tout, on tend presque vers l'anarchie, c'est jouissif... Et puis ça fait du bien de remettre certaines idées en place, certains événements également ( on manque cruellement de film de ce genre ) : les chefs d'état ont du sang sur les mains, énormément et on prend malgré tout notre bulletin de vote, on s'isole, on ferme les yeux et on joue au beau soldat civique et civilisé. Le mensonge « L'ordre et la morale » le refuse et s'implique totalement dans ce qu'il a à dire. N'hésitant pas à faire de son personnage principal, tantôt la figure d'un héros, intelligent et sensé et ensuite celle d'un lâche incapable de rejeter ce par quoi il est dominé, se fondant dans les directives, les ordres et abandonnant la cause... Eh oui, car que dit Mathieu Kassovitz ? Il appelle à la résistance, d'abord à travers un fait historique, mais la portée est ailleurs, bien plus loin, se soumettre c'est s'oublier, c'est renoncer alors sans doute mieux vaut choisir la mort que le non-choix et la déchéance de l'être... « De quoi dégueuler vraiment... »