Voilà du vrai cinéma français, de la psycho, un personnage borderline, un poil de thriller, une plutôt souriante (sinon vraiment happy) end. L’héroïne, Elsa, a perdu son nouveau né, une fille dans l’incendie de la clinique d’accouchement –et ne s’en est jamais remise. Elle veut se persuader que l’enfant est toujours en vie, erre de visite en psychiatrie en prise de psychotropes, finalement son mari la quitte, ses parents restent désarmés devant cette absurde obsession, et il est évident qu’elle perdra, après le divorce, la garde du petit garçon qui reste. Un jour, au hasard d’une fête d’enfant, elle voit une fillette, d’âge correspondant, et, de façon aveuglante : c’est Elle. S’en suit une lente dérive où Elsa, pour s’introduire dans l’intimité de cette famille bourgeoise, équilibrée, heureuse, fait n’importe quoi, au détriment, entre autres, de l’équilibre du fils bien réel. Il faut le dire : Catherine Frot est formidable. Comme toujours, d’ailleurs. Cette actrice à la diction artificielle parle faux, et joue plus que juste. La façon dont elle fait vivre cette femme désespérée qui, si forte que soit sa conviction, sait bien aussi, en même temps, qu’elle n’est pas crédible, est magistrale. Quant à Sandrine Bonnaire, qui surréagit face au danger présenté par cette folle, elle est épatante aussi. Deux femmes, pas maquillées, à peine coiffées, deux femmes dans la quarantaine de n’importe quelle banlieue résidentielle. Deux vraies femmes dans la vraie vie, même si ce qui leur arrive est plutôt exceptionnel (quoique inspiré d’une histoire vraie, à ce qu’on nous dit). Faut-il y voir une exaltation d’un « sentiment maternel » qui sentirait des réalités inaccessibles à la raison et à la logique ? Personnellement, je ne suis pas fanatique de cette interprétation…. Mais, s’il n’y a pas, dans ce film, un César de la meilleure actrice à la clé, c’est à désespérer des jurys de cinéma. Je ne connaissais pas Safy Nebbou : je suis ravi d’avoir fait sa connaissance !