Même s'il s'agit d'une coutume assez ancienne, l'enterrement de vie de garçon connait un développement important ces dernières années, et le cinéma ne pouvait pas rester insensible à tout ce que ce rite transgressif peut apporter de dérapages tragico-comiques, de "Very Bad Things" à "Sideways" en passant par "Ivresse et conséquences". Comme le Spring Break, cette semaine de teuf orgiaque au Mexique des étudiants américains, l'enterrement de vie de garçon fait partie de ces coutumes que l'Amérique puritaine autorise afin de mieux permettre le retour à la normalité sociale.
Cette normalité nous est annoncée dès les premiers plans, avec traveling sur les préparatifs du mariage : pièce montée, robe ivoire, livraison de fleurs et alignement de chaises blanches devant la tonnelle. Pourtant, le gène de l'entropie apparaît très vite avec le personnage d'Alan, le beauf simplet dont Doug dit qu'"il a un bon fond" alors qu'à l'arrière-plan celui-ci menace un retraité en beuglant "Ca ne me dérange pas de cogner un vieux !"
C'est effectivement par lui que le déraillement arrive, nous amenant au réveil des trois potes du futur mari dans une suite à 4 200 $ dévastée comme après le passage d'un rock star, jonchée de cadavres de bouteilles et peuplée d'une poule (le gallinacée, la dernière strip-teaseuse s'étant esquivée juste avant) et plus inquiétant, d'un tigre dans la salle de bains. Accessoirement, Stu a perdu une dent et les trois copains le héros de la fête.
La recherche de Doug va se superposer à la découverte des dégâts collatéraux de la nuit d'amnésie, avec pêle-mêle la salle des urgences, la chapelle de mariage express, une démonstration du taser par des policiers sadiques devant des écoliers en visite pédagogique, un remake de "Rain Man", et en guest star, Mike Tyson dans le rôle de Mike Tyson.
Par le côté gentiment frappadingue de quelques situations à la limite du politiquement incorrect (le prof qui finance sa beuverie avec l'argent des sorties scolaires ou le crooner chantant une chanson paillarde au mariage), ainsi que par le rôle central joué par les véhicules allemands, "Very Bad Trip" (encore une étrange traduction "française" de "The Hangover") fait parfois penser à "Little Miss Sunshine". Regrettons simplement qu'à l'inverse du film de Jonathan Dayton et Valerie Faris, celui de Todd Philipps n'aille pas jusqu'au bout de son iconoclastie, et au contraire, s'achève par un happy end qui institutionnalise la fin la transgression et le retour à la norme.
Néanmoins, la logique de l'absurde et l'avalanche de catastrophes rythment efficacement cette comédie potache, et on rit très souvent même si parfois le rire se coince devant l'indubitable manque de finesse de certaines scènes (Alan et le bébé, le personnage de Chow). Film bienvenu pour la Fête du Cinéma, "Very Bad Trip" réussira sans doute à plaire à la fois aux amateurs d'"American Pie" et à ceux de "Little Miss Sunshine" ou de "Juno", et c'est déjà pas mal.
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