"Claude Lelouch : souvenez vous de ce nom, vous n'en entendrez jamais plus parler !", écrivaient en 1960 Les Cahiers du cinéma. 50 ans plus tard, le réalisateur signe un film-somme qui, c'est sûr, ne plaira pas aux Cahiers. Pourtant, après Roman de gare, d'assez heureuse mémoire, on pensait Lelouch assagi et fatigué, peut-être, de ces fresques historico-romanesques, le plus souvent indigestes, qu'il a a tant aimé concocter.
On avait tort : pour fêter ses 50 ans de cinéma, le voici reparti comme en 40, c'est le cas de le dire, avec Ces amours-là, un pudding invraisemblable où de (petites) histoires amoureuses se confrontent à la grande (histoire), de l'Occupation allemande à la Libération, principalement, avec un flashback au temps des Frères Lumière et un flash forward en 2010, parce que quand on s'appelle Lelouch, c'est tout un siècle qui doit se dérouler sous nos yeux ébaubis.
Franchement, c'est désarmant de naïveté, une telle ambition, et en même temps touchant, parce que si Lelouch a bien un grand amour dans sa vie, c'est celui du cinéma. On peut même lui pardonner les auto-citations et l'autobiographie, puisque c'est son anniversaire. Avec tout ça, on en oublierait presque que son film est terrible, dans l'acception la plus négative du terme.
Passons sur le scénario, le destin d'une femme qui a aimé successivement un français, un allemand puis deux américains. Comme d'habitude, c'est un prétexte. Lelouch filme les rafles juives, Auschwitz, le débarquement américain (scène ridicule), les allemands à Paris, de la même façon, avec une candeur qui frise l'inconscience. S'est-il au moins aperçu que certaines scènes sont jouées de façon atroce (celles avec le mari américain de son héroïne) ? Audrey Dana, plus qu'excellente dans Roman de gare, semble ici complètement perdue dans le maelström d'émotions qu'elle est censée exprimer.
Les images défilent et soudain, par on ne sait quel miracle, il y a une vraie scène de cinéma, émouvante, semblant comme improvisée, comme celle vers la fin du film, dans un café, avec le chanteur Raphaël. Mais ils sont trop rares ces moments de presque grâce, emportés par la fougue du réalisateur qui, comme souvent, embrasse trop et étreint très mal.
On dira, c'est du Lelouch ! Mais pas du bon, du médiocre même, pour ce qui est de la majeure partie de Ces amours-là. La fête d'anniversaire est un peu gâchée, désolé.