Après le road-movie et le drame romantique, Terrence Malick adapte son cinéma à un genre propice tant à la série B bas de gamme qu'au chef-d'oeuvre auteuriste : le film de guerre. Ici, on a droit à une réflexion sur la recherche de Dieu, qui mène à un constat rousseauiste, loin d'une image divine bienveillante et paternaliste. La guerre a beau faire rage, l'Homme, encore plus enchaîné à sa condition mortelle et charnelle que dans Days of heaven, ne goûte à la lumière céleste qu'avec parcimonie, à travers de minces rais de lumière qui peinent à éclairer les visages agonisants. Les rares regards que Malick daigne lever vers le ciel ne dévoilent en outre que des charognards ou autres bombardiers. Cette fois, la Nature n'est plus idéalisée, autant piège que protection, et l'Homme y erre, pétri de doutes, de peurs, d'incompréhensions. L'utilisation (certes très redondante) de la voix off est d'ailleurs un des gros plus de The Thin Red Line, elle qui en apparence donne à l'oeuvre une autre dimension, et démolit ce faux-semblant en rappelant derechef l'Homme à son impuissance via des lignes de textes pétries de questions ou de constats amers. Dans la forme, on tient là, je l'ai dit, la seule vraie bonne idée. Car si la mise en image de Malick est jolie, elle n'est pas pour autant d'une beauté à se damner. Mais surtout, les artifices visuels n'ont jamais aussi bien porté leur nom, eux qui ne servent à nouveau qu'à illustrer (et maquiller) un propos flou, qui baguenaude entre plusieurs idéologies sans jamais trouver de parti pris (ce qui n'est pas un mal en soi mais le devient quand le propos est la raison d'être du film). Sinon ? Des personnages galvaudés, un casting sous-utilisé, des idées sous-développées, une réalisation pas toujours parfaitement fouillée, et en définitive, plus des images mises bout à bout qu'un ensemble véritablement cohérent. Et puis, vingt ans pour en arriver à ça... bref, Malick et moi, c'est tout sauf le grand amour.