"Doctor Strange", le nouveau Marvel, l'énième film commercial à grand budget, amasseur de fric et de foules (dont je fais partie, sans être - et c'est important de le souligner - un fana hardcore de l’univers, juste un spectateur lambda) - du pain et des jeux disait-on dans la Rome Antique, aujourd'hui du pop-corn et du Marvel dirait-on - me rappelle tout ce que "Ant-Man" (vous savez la petite fourmi !) n'a pas su faire. Alors qu"Ant-Man" se déroulait du côté de l'infiniment petit sans jamais parvenir à nous immerger dans cet univers microscopique infini et sidérant (mis à part une scène), préférant en rester du côté de la mauvaise galéjade un tantinet foirée puisque pas drôle et du film de genre hors-sujet et mal construit puisque caricatural, ici, "Doctor Strange" a, semble-t-il, retenu les leçons de ce film Marvel qui passe complètement à côté de son élément principal. Ici donc, "Doctor Strange" nous fait découvrir l'infiniment grand, le macroscopique du monde, le gigantisme des choses, de l'univers, DES univers au sein de séquences folles, visuellement grandioses, époustouflantes, diablement bien réussies et attractives. Le film nous montre ce qu'on attendait, ce sur quoi son ambition devait en effet se tourner. Ce film joue avec le temps et l'immensité des mondes de l'univers avec un aplomb réjouissant et une virtuosité dingue qui en ferait pâlir Peyton Reed. "Doctor Strange" va au cœur de son sujet, au plus profond de ses possibilités, et rien que pour ça, l'objectif est atteint. On ne saurait passer sous silence l'excellent Benedict Cumberbatch qui incarne à merveille ce personnage torturé et pince-sans-rire du "Docteur" auquel le spectateur s'attache, le prenant en empathie très rapidement. A côté de cela, de cette réussite indéniable, oui, bien-sûr, ô combien de défauts viennent entacher cette vision quasi-idyllique d'un film Marvel. Cette "origin story" comme on dit en bon français, quoique très réussie dans sa première partie (présentation du neuro-chirurgien et élément perturbateur), prend malheureusement des allures de paysages que l'on verrait défiler à bord d'un TGV : ça va trop vite, on ne voit pas tout, les éléments sont flous, partiellement étudiés - passés sous silence ou effleurés du doigt - tant et si bien que l'on arrive au terme du voyage un peu... promptement. Alors ne nous épanchons pas davantage sur ses facilités hasardeuses, cela fait partie du jeu chez Marvel, la facilité. Rien que pour la proposition visuelle et le parti pris sensationnel de cette exploration à travers d'autres dimensions spatio-temporelles, "Doctor Strange" mérite son bon point, une image à la sortie du cours, parce que rien ne saurait nous faire plus plaisir que cet élargissement du point de vue à travers un personnage charismatique et attachant. A bas les Iron Man, Thor et autre Captain America, votre heure est venue, inclinez-vous devant le petit nouveau... jusqu'à ce que celui-ci se conforme à son tour, rentre dans le moule des Avengers et n'ait plus de cohérence avec lui-même quand trop d'évènements et de paramètres rendront impossible la vraisemblance de ces histoires imbriquées les unes aux autres. C'est là que la bât blesse chez Marvel : ils ont construit un univers au-dessus de leurs moyens et de leurs compétences, c'est ainsi qu'il faut prendre "Doctor Strange" pour ce qu'il est : une curiosité, une "étrangeté".