Un geek movie purement récréatif qui n’a rien absolument rien à dire, mais qui l’exprime avec un vrai talent, notamment lors d’une séquence finale colossale. Où classer les Avengers ? Parmi les nanars ? Il est vrai que sa propension immodérée pour le kitsch façon années 70, avec ses destructions massives spectaculaires et le rassemblement putassier de super-héros propre au comics d’origine, a tout du mauvais goût. Et bien non, raté, les Vengeurs échappent largement au kitsch. Cela tient quand même au miracle quand on sait qu’on réunit ici un milliardaire play-boy et coquin dans une armure métallique, un dieu extra-terrestre muni d’une enclume, un géant vert irascible qui a floppé plus d’une fois en salle, un gominé en tenue moulante représentant toutes les vertus patriotiques américaines des années 40 et une veuve noire aux petites fesses moulantes, plus espionne taquine que super-héroïne. Non, "Avengers" échappe bel et bien au kitsch, sans pour autant se montrer évident au premier abord. Toutes ces désormais stars héroïques de cinéma (elles ont presque toutes eu droit à leur film au préalable) sont initialement réunies à l’écran pour pas grand-chose, un prétexte scénaristique assez boiteux. L’origine du danger (le frère de Thor, Loki !) aurait pu être résolue par Superman (DC Comics) en solo... Pas besoin d’être une demi-douzaine de héros pour cela. Leur impuissance face au méchant shakespearien maigrelet, vite arrêté et contenu dans une prison de verre, au cœur du vaisseau aérien gigantesque appartenant au S.H.I.E.L.D (un destroyer des airs, en quelque sorte, où une bonne partie du film va se tenir) relève presque de la maladresse d’écriture. Toutefois, cette histoire simplette passe bien. Le charisme des vedettes incarnant les sur-hommes (et une femme), Robert Downey Jr. en particulier, mais Chris Hemsworth aussi, y est pour beaucoup; l ’alchimie entre eux est évidente, rendant possible ce buddy movie cosmique. Il se dégage un humour satisfaisant de leur confrontation puis de leur association dans l’adversité. L’union de leurs forces est largement justifiée par une séquence finale épique, longue de plus d’une demi-heure dantesque où les effets spéciaux incroyables de précision justifient bien la levée d’une armée de gros bras à cape ou à combinaison. Cette fin colossale balaye tout ce que l’on a pu voir récemment dans le genre. Grâce notamment à l’incroyable savoir-faire visuel et technique de Joss Whedon, qui connaît bien ses classiques Marvel et sait se montrer amoureux des matériaux d’origine, sans pour autant sombrer dans la déférence pathologique, on en oublie les premières minutes, longues en présentation, private jokes, égos de stars et instants geeks. Le rythme assez mollasson de la première moitié du film, qui finalement offre peu de changements de décors, se dissipe pour de purs moments de bravoure où demeurent toujours la bonne humeur générale qui transpire la sincérité et la bonne fratrie, quand d’autres piètres cinéastes nous auraient servis une bouillie infâme ! Le film a coûté 220 millions de dollars. Tout est beau et cohérent, impressionnant et fulgurant. Joss Whedon est dans l’équilibre (colorimétrique notamment pour éviter les surcharges écœurantes), celui d’un univers qui est affirmé comme existant et qui refuse la démonstration pour récupérer son audience. Il est vrai que Paramount et Marvel, puis Disney et Marvel lorsque la firme de Mickey a racheté l’héritage de Stan Lee, ont dépensé beaucoup d’énergie ces dernières années à travers les épisodes solos des vedettes Iron Man, Hulk, Thor et Captain America; aujourd’hui cela paie légitimement à l’écran. Bref, même s’il est loin d’accéder au statut de chef d’œuvre à cause d’un pitch de départ mineur, et s’il est loin de flirter avec les cimes d’un "The Dark Knight" car volontairement fun et dynamique plutôt que sombre et introspectif, "Avengers" est une réussite en son genre qui saura conquérir les geeks de toutes générations et les masses d’ados amatrices de démolitions incontrôlées. Les plus rationnels des spectateurs passeront leur chemin. L’âge de la récréation passé, ils n’auront pas grand-chose à quoi se raccrocher dans cette comédie d’action pure pourtant estimable à qui l’on souhaite tout le succès qu’il mérite. Et il en aura ! Un film de super-héros vraiment pas mal au final