Probablement un des films les plus choquants de Ken Loach, même s'il ne restera pas comme le meilleur.
"L'héroïne" prouve une fois de plus, si besoin était, ce que l'économie de marché peut engendrer de plus sordide dans l'exploitation de l'homme par l'homme.
Certes, on y apprend rien qu'on ne sache déjà, et l'aspect documentaire peut ennuyer, mais le fait que cette besogne soit effectuée par une belle jeune femme, prise elle-même dans l'engrenage des créances, ramène l'histoire à un niveau plus humain, auquel le spectateur peut s'identifier.
Ce que manifestement, certains n'ont toujours pas saisi, c'est qu'il s'agit, non pas d'une dénonciation de l'exploitation de la main d'oeuvre immigrée, connue depuis des lustres, mais d'une analyse du mécanisme par lequel le capitalisme pousse l'individu à ne penser qu'à sa propre existence, son propre profit, quitte à marcher sur la tête des plus faibles pour en tirer un peu d'oseille.
Malgré un engagement politique certain, inséparable du cinéma de Ken Loach, le film démontre cependant avec brio, et sans manichéisme que, plongé dans un tel système, n'importe qui peut franchir la ligne qui sépare l'exploité de l'exploiteur, et devenir à son tour un instrument d'oppression.
Il convient d'ailleurs de citer la remarquable prestation de Kierston Wareing, en mère inconséquente mais fonceuse, tiraillée entre son devoir parental et sa besogne de quasi marchande d'esclaves sans états d'âme, justifiant tant bien que mal ses actes par le nombre de claques dans la gueule que la vie lui a donnée.
Ce qui rend cette "Vampirella" si crédible, c'est que bien que ses combines lui reviennent fatalement en plein figure, tel le joueur invétéré ou l'alcoolique notoire, rien ne l'empêchera de retomber dans ses travers, dans l'éternel cercle vicieux, à savoir exploiter pour ne pas être exploité soi-même.
Un film coup de poing, dont la seule conclusion logique pour le spectateur, c'est qu'il est plus que temps que ça change, radicalement..