Tout a un début et tout a une fin.
Nous sommes les fils du destin et le destin nous guide aveuglément dans les sentiers vierges de nos vies.
Tout est tracé à l'avance, nous ne choisissons pas mais nous comprenons pourquoi on choisit.
Nous nous questionnons sur le but de notre existence, et nous nous sentons si petits à côté de l'infinité de possibilités de qui pouvons-nous être.
D'où nous venons ? Peut-être déjà d'autre part, d'un au-delà ou d'un en-arrière inconnu, qu'importe : le moment présent a raison de nous et c'est à lui que nous devons nous fier.
Il y a une infinité de vies qui nous attendent, elles méritent toutes d'êtres vécues au plus digne.
Pourquoi Mr. Nobody est mon film préféré.
C'est la question qui m'est souvent posé et la question que je me suis longtemps posé moi-même pendant un moment.
Comment se fait-il que ce soit lui et pas un autre ? J'ai pourtant vu des dizaines de films que je saurais qualifier de chefs-d'œuvre.
Mais pourtant, Mr. Nobody.
Le film boudé par la presse et aujourd'hui un brin oublié. Et il trône sur mon podium au-dessus de n'importe quel prétendu intouchable que j'ai pu m'enfiler en plusieurs années de cinéphilie.
Quelque part je peux comprendre l'imposture que certains dénoncent à l'égard de ce film.
Mais d'un autre côté je le réfute et je savoure chaque revisionnage encore plus que le précédent.
Cet amour inconditionnel pour ce titre est à l'image de la division qu'il a engendré : lucide et inexplicable.
Lucide déjà car j'entrevois les défauts de l'œuvre.
Oui le concept est casse-gueule et est forcément inégal à bien des aspects.
Oui Jaco van Dormael (cinéaste sous-estimé à mon humble avis) use d'effets de style parfois trop généreux qui empruntent parfois à la publicité.
Oui les visuels sont souvent aguicheurs.
L'accueil tiède qu'a reçu le film est facilement compréhensible pour quiconque y prêterait de l'attention.
Mais lucide à propos de moi, et là je parle vraiment de moi.
Ce film a simplement été là piur moi au moment où j'en avais besoin, où j'étais un peu perdu dans ma vie, et il est arrivé avec la question : qu'est-ce qu'un choix ? Et qu'est-ce que l'avenir ?
On peut dire bien des choses, mais le film aborde parfaitement la question en prenant la situation la plus banale : un enfant qui doit choisir entre son père et sa mère.
Et pourtant dès le début PAF ! On te montre le protagoniste mourir de plusieurs façons différentes et on suit ensuite ce dernier à l'âge de 117 ans raconter son histoire.
Niveau efficacité on fait rarement mieux En 10 minutes on sait où vont mener les 139 prochaines (158 pour les amateurs de la director's cut).
Et il y a toujours un nouvel angle sur lequel la thématique est abordée.
Un choix amoureux, déjà, et surtout. L'amour est l'essence du long-métrage et guidera Nemo à Anna.
Ensuite un choix théorique, explicant la probabilité des choses et abordant la fascinante théorie du big crunch qui aspire à la rétractation de l'univers ainsi que du temps après son expansion, puis à la re-expansion et ainsi de suite, nous plongeant dans une boucle temporelle infinie et nous faisant dire que nous vivrons des millions de choses dans des millions de vies.
Alors pourquoi pas suivre nos rêves ? Nous avons toutes nos chances. Littéralement.
[SPOILERS]
L'ambiguïté du final avance le mieux cette piste, laissant ce choix au spectateur et le questionnant sur ses propres choix. La hauteur de vue idéale pour un film qui chervhe tant à atteindre l'universalité.
[FIN DES SPOILS]
Et c'est pourquoi je trouve l'indifférence dont subit Mr. Nobody aussi absconse.
C'est un film qui touche à l'essentiel de ce qui font de nous des humains : nos émotions.
Ces émotions qui nous guident et nous font surmonter les plus hauts dangers avec bravoure.
Ces émotions qui nous rendent si glorieux par la moindre réussite que l'on entreprend.
Et c'est là que j'ai été totalement bouleversé par Mr. Nobody à sa découverte.
Un film qui part autant dans tous les sens tout en restant cohérent avec soi-même, il y en a bien peu.
Un film qui lui ressemble, il y en a aucun.
Et je préfère mille fois (euphémisme) un film inégal mais au propos aussi brillant et brillamment délivré qu'un produit propre au point d'être lisse.
Mr. Nobody est tout sauf lisse. Il est imparfait, un peu biscornu, et c'est pourquoi je le trouve aussi beau.
C'est un film qui a essayé, et c'est suffisant pour qu'il reste au sommet de mon podium à jamais.
Une magnifique difformité.
Le visage d'un Ange et le corps d'un humain.
Ce n'est pas pour rien que Jaco van Dormael filme autant la pureté de nos yeux, car c'est ce qui trahi le plus nos émotions, c'est ce qui dit l'indicible, c'est notre plus belle réussite en tant qu'humains : être des humains avant tout.
Un film préféré, c'est celui qui se dresse sur notre parcours sans qu'on l'anticipe.
C'est celui qui nous bouleverse sans que l'on s'y attende.
C'est la révélation, l'apparition divine au milieu d'un jardin cinématographique que l'on pensait connaître par cœur.
Et pour moi c'est Mr. Nobody.
Il ne faut pas juger les gens sur leur film préféré. Ne pas voir cela comme jne finalité, bien au contraire.
Le voir comme un nouveau départ.
Comme une nouvelle vie. Ma nouvelle vie, et la vôtre pour votre film préféré.
Cette nouvelle vie qui aurait pu être bien différente sans cette illumination et qui l'aurait été grâce à une illumination totalement différente.
Le cinéma est un art riche, et nous avons la chance de chacun pouvoir y trouver son idéal.
Et de changer nos vies.
À jamais.