Danny Boyle est surement, certainement même, l'un des meilleurs réalisateurs de notre génération, voire de notre siècle. Il n'hésite pas à traiter des sujets difficiles et parfois presque insupportables aux yeux des plus sensibles, notamment avec son poignant 127 heures où James Franco y incarnait d'une manière parfaite, humaine et toute en émotion Aron Ralson, cet alpiniste qui restera plusieurs jours, le bras coincé contre un rocher, dans un canyon isolé dans l'Utah. Ici, il nous amène dans les paysages colorés, appauvris des bidonvilles et enrichis des grandes villes, indiens où nous découvrons la vie, peu à peu, à chacune des questions de Qui veut gagner des millions ?, la vie mouvementée de Jamal Malik, de son enfance dans les bidonvilles avec son frère Salim et Laïtika, la fille qu'il a toujours aimé et qu'il ne cesse de chercher à chaque seconde de sa vie, jusqu'à ce moment fatidique où il doit répondre à la dernière question à 20 millions de roupies. Jamal Malik est sans aucun doute un personnage attachant, et tout le monde sera touché devant son histoire hors du commun où sont mêlés, inlassablement, l'amour, la haine, la violence, la nostalgie, l'injustice. Slumdog Millionaire est tout en justesse, aucune scène, aucune parole, ne faisait cliché ou faux, comme si toute cette histoire, ces personnages, avaient réellement existé.
De plus, ce métrage a une multitude de personnages et d'émotions qui le rend plus exceptionnel encore. Tout d'abord, parlons de ses personnages, tenus par des acteurs, tous indiens pour donner un côté encore plus "vrai" de la part du réalisateur, presque tous amateurs et qui remplissent leur mission de rendre aux personnages toute leur véracité à merveille. Commençons par ses trois acteurs principaux, jeunes et beaux, qui forment ici un trio qui restera dans les annales, avec, en tête d'affiche Dev Patel, que j'ai par la suite adoré dans la série pour adolescents Skins. Bien qu'amateur à cette époque-là, je ne sais pas qui aurait pu tenir mieux que lui le rôle du personnage courageux et fort attachant de Jamal. Le fait qu'il soit encore amateur ne peut que lui apporter des avantages ; il ne joue pas simplement Jamal, il est Jamal. On pourra en dire autant de Freida Pinto (Laïtika) qui illumine par sa beauté naturelle et sa prestation toute en simplicité et sa facilité à jouer l'amoureuse (pas vraiment puisque Freida et Dev Patel auront connu une relation derrière l'écran) sans paraître cucul la praline. Quant à Madhur Mittal, qui a des faux airs du très beau Bruno Mars, on ne pourra que saluer son jeu d'acteur parfait, vacillant durant tout le métrage entre le bon et le mauvais Salim, celui qui serait prêt à violer Laïtika pour rendre fou son petit-frère, et celui qui laisse échapper cette dernière au coût de sa propre vie pour la laisser retrouver Jamal et enfin connaître l'amour, le vrai. On pourra aussi saluer les versions jeunes et adolescentes des acteurs, merveilleusement mises en scène lors du générique final haut en couleur. Les seconds rôles sont à la hauteur des principaux et on pourra plus principalement remarquer Anil Kapoor, véritable star pour le cinéma bollywoodien et qui incarne ici le présentateur de l'émission au caractère ambigu, et Irrfan Khan, l'inspecteur qui interrogera inlassablement Jamal en tentant de le faire avouer qu'il triche avant de se passer du côté des "gentils" et de le défendre, lui et son histoire.
Les scènes sont à la hauteur des paysages de Slumdog Millionaire : toutes plus magnifiques que les autres. Des milliers d'émotions nous traversent durant le visionnage, et la force de Danny Boyle est de pouvoir nous faire rire et pleurer en même temps, comme notamment les scènes où Jamal et Salim sont enfants, comme au Taj Mahal ou lorsque Jamal court, sortant juste des toilettes, rempli d'excréments, pour pouvoir avoir son autographe. Tout est travaillé au millimètre prêt, la photographie étant particulièrement plus belle, comme avec cette scène où
Salim se plonge dans un bain rempli de billets et se suicide
. A l'opposé de cette violence qui est caractéristique de cet univers, les paysages d'Inde, pleins de sagesse et de tranquillité, nous font voyager et rendent ce pays encore plus beau. La bande originale est aussi belle que les décors et nous laissons entraîner par les différentes musiques, notamment le très connu Jai Ho ! d'A.R. Rahman, qui clôt le métrage avec une joie de vivre rafraîchissante.