Un titre qui ne me disait pas grand-chose, mais pour lequel je me suis laissé finalement tenter en raison d’un visionnage en salle Ice. Si point de vue ambiance lumineuse, la technologie de cette salle n’apporte pas vraiment grand-chose, sa grande qualité acoustique avec le son dolby atmos apporte un vrai plus. Mais de là à payer un tel surcoût, je ne suis pas sûr que ça en vaille vraiment la chandelle, surtout si vous avez des salles réputées pour leur qualité audio. Bien que le fond de l’histoire n’est en soi pas très nouveau, "Invisible man" est une très bonne surprise. Une très bonne surprise qui vous fera passer efficacement deux bonnes heures de votre temps. Rien de très étonnant point de vue qualité quand on sait que Leigh Whannell a travaillé avec James Wan, celui-là même qui est considéré comme le nouveau patron du genre épouvante thrilleritique. Excusez-moi du terme, j’invente des mots mais je ne vais quand même pas dire thriller épouvantable ! Ça ne veut pas du tout dire la même chose ! Bref ! Encore faut-il savoir mettre les leçons reçues à exécution. Eh bien le résultat est plus qu’honorable. Je dirai même plus, il est convaincant. Il frôle l’excellence. Le générique de début est déjà original et surtout extrêmement bien fait : ces lettres qui se matérialisent sur chaque vague donnent déjà un aperçu sur la qualité des effets visuels. La confirmation ne tardera pas à venir, que ce soit par le biais de la couverture, ou de la table de la cuisine. Puis la caméra braque une maison perchée au sommet d’une falaise, étonnamment éclairée alors que tout le monde dort, bercé par le vacarme de la houle qui bat inlassablement la roche. Tout le monde ? Presque ! Le souffle haletant, la peur au ventre, une femme s’extrait de son lit. On comprend rapidement son dessein, et on se demande pourquoi elle n’agit pas quand lui n’est pas là. Ce serait tellement plus simple ! Mais la réponse nous sera apportée ultérieurement par la description faite d’un homme éminent, qui se trouve être un aussi un maniaque du contrôle. Au cours de cette fuite, une première incohérence vient rapidement : le fait qu’elle se fasse rejoindre pile poil à l’endroit où elle se trouve, et non pas à 50 mètres, 100 ou plus ! Il n’empêche que le spectateur ressent sa peur, mais pas autant qu’elle. D’abord parce qu’on se demande encore ce qu’il se passe et pourquoi (surtout pourquoi), notamment si on a pris le soin d’éviter comme moi le visionnage de la bande-annonce et la lecture de toutes les informations relatives au film comme le synopsis ou les différents avis. Certes notre peur n’est pas à la hauteur de celle que ressent Cecilia, mais le véritable tour de force du cinéaste est de savoir par moments inverser la tendance. La buée du souffle derrière elle en est un parfait exemple, mais attention : c’est très court et on peut facilement rater ce moment. Dès les premières images l’attention du spectateur est retenue, mais celui-ci devra faire preuve d’une attention de tous les instants, ce qui ne devrait pas être trop dur. En effet, Leigh Whannell connaît les codes du genre, sait utiliser les jump-scares sans en abuser, et parvient même à nous surprendre complètement ! La scène du restau ou de la gifle sur la jeune Sydney (Storm Reid), avouez quand même que c’était inattendu, d’autant que ça arrive de façon très soudaine ! Sans compter que c’est l’occasion de mesurer l’intelligence de l’homme invisible, et donc forcément du scénario : être invisible, c’est bien, mais quand on peut faire en sorte de faire accuser quelqu’un d’autre pour chacun des méfaits commis, c’est mieux. En tout cas malin. Non, pas malin, c’est machiavélique ! Le cinéaste aurait pu se contenter de ça, mais voilà que de temps en temps il tourne sa caméra sur un endroit où il ne se passe rien. Mais en est-on sûr, qu’il ne passe rien ? Une belle façon en tout cas, de rendre le spectateur un peu parano sur les bords. Alors quand en plus la musique de Benjamin Wallfisch vient renforcer tout ça, forcément on ne peut qu’être pris dans cette intrigue un peu dingue, il faut l’avouer. Cependant "Invisible man" tire aussi son épingle du jeu dans la façon de traiter le sujet. Ici nous n’avons pas affaire à une fuite en avant (quoique dans un premier temps si), ni à une poursuite incessante du persécuteur (bien qu’elle soit bien présente), mais plutôt à une volonté farouche de se défendre, de combattre ce qui ne se voit pas aux yeux des autres. Le point de vue réaliste n’est pas pour autant oublié, confrontant les autres personnages à l’inexplicable et donc à la confrontation avec ce qui ressemble à de la folie. N’oublions pas qu’à leur place, nous réagirions comme eux et que pour Cecilia, il y a de quoi perdre totalement la raison si elle ne connaissait pas aussi bien son diable de mari. En parlant de ça, notons la très bonne prestation d’Elisabeth Moss qui a la lourde charge de porter le film sur les épaules si on excepte la technique de Leigh Whannell. On voit une évolution parfaite de son personnage, passant par toutes les étapes de la personne terrorisée à la femme fatale. Saluons cette implication qui n’a pas dû être de tout repos. Saluons aussi la performance de Leigh Whannell qui aurait pu se contenter de finir là où beaucoup d’autres auraient mis un terme à leur long métrage. Non, tel quelqu’un qui veut aller jusqu’au bout des choses, il nous offre une dernière pirouette, non content d’avoir su précédemment brouiller les pistes quant à l’identité du persécuteur. Après tout, si on y réfléchit un peu, tout est possible ! Et en plus ça se tient ! Punaise, on n’a pas fini de se triturer l’esprit avec ça… un peu comme l’avait fait "Basic instinct" à l’époque : souvenez-vous, ne vous êtes pas demandé si la vraie meurtrière était… la brune ou la blonde ?