A voir surtout pour la composition bluffante d'André Dussollier en Staline, peu incarné au cinéma jusqu'alors, pour ce qui restera l'une de ses plus grandes prestations au cinéma; En choisissant Dussollier, Marc Dugain a certainement voulu choisir un acteur qui transpire naturellement la bonhomie et le calme pour mieux nous faire ressortir la perversité et la paranoïa du personnage, jouant ainsi avec nos nerfs dans le sens où l'on se demande si Staline pouvait manifester de l'empathie pour autrui et son interlocutrice Anna...
La réussite de ce film c'est donc les confrontations entre Staline et Anna, jeune talentueuse urologue, dotée de dons de magnétiseuse, qui se retrouve contrainte, dénoncée par des collègues jaloux, de "soulager" le tyran dont l'état se dégrade peu à peu. Face à Dussollier, Marina Hands est surprenante d'émotions et de force, ce que demandait la composition de son personnage. Si Anna tient la "dragée haute" face à Staline malgré la terreur que se dernier instaure, Marina Hands tient la barre face à la prestation d'André Dussollier.
Cependant, il est regrettable que ce qui retient surtout notre attention dans ce film soit ces quelques scènes, véritables colonne vertébrales du film. Finalement, ce qui tourne autour, ne nous procure pas vraiment d'émotions comme l'histoire entre Anna et son époux Vassili (Edouard Baer, sobre), qui semble accessoire ou prétexte pour nous introduire auprès de Staline.
Sinon, intéressante retranscription de l'atmosphère de suspicion et de délation de la société soviétique où tout le monde surveille tout le monde. A cet égard les scènes de l'hopital, lieu de travail d'Anna, sont réussies via la description réussie de psychologie de ses collègues, qu'il soit de son côté (le directeur joué par un Tom Novembre touchant) ou alors qui sont prêt à tout pour l'écraser (son chef de service libidineux joué par un remarquable Grégory Gadebois).
Dans l'ensemble, la mise en scène de Marc Dugain s'avère ultra-classique. Il prend peu de risques et, par moments, on a l'impression d'asphyxier, tant on a une sensation de lenteur et de lourdeur; procuré également par les choix techniques et esthétiques (photo et image à la tonalité marron-grise, décors ternes...). Au final, peut-être que ce choix de mise en scène et en image est voulu par Dugain pour mieux faire ressortir le sentiment d'oppression, de blocage et de malaise et d'angoisse généralisé de la société russe sous Staline en fin de règne. Peut-être aurait-il pu, alors, développer une vision plus critique de la politique du régime stalinien, adopter un style qui fait moins huis-clos et moins littéraire dans ses dialogues (adaptation d'un de ses romans à succès) en accélèrant le rythme et en s'autorisant plus d'audace dans les cadrages.
Malgré les défauts inhérents à toutes première oeuvres, film à découvrir, si ce n'est pas fait !