Le Britannique Kevin MacDonald ("Le dernier roi d'Ecosse", "Jeux de pouvoir") adapte ici un roman historique pour ados écrit par Rosemay Sutcliff dans les années 50, dont la trame concerne une des hypothèses de la disparition de la légendaire Neuvième Légion. La scène est en 140 après J.C, aux marches de l'Empire romain, sur l'île de Bretagne (l'actuelle Grande-Bretagne). Marcus Aquila, un jeune centurion de grande bravoure, entreprend un périlleux périple au-delà du Mur d'Hadrien (en fait peut-être plutôt du Mur d'Antonin, qui doublait ce dernier au nord), dans la seule compagnie d'Esca, un prince brigante de son âge réduit à l'esclavage (les Brigantes étant une peuplade établie dans ce qui est aujourd'hui le Yorkshire) qui doit lui servir d'interprète dans sa recherche de la Neuvième Légion, et plus encore de la cohorte commandée par son père. Ils s'aventurent en territoire calédonien (l'Ecosse), guidés par les rumeurs faisant état d'une tribu picte ayant récupéré l'aigle romaine, emblème de la légion disparue, et l'associant à son culte. "The Eagle" est une histoire simple (quand d'aucuns diraient à tort, vieillotte, dépassée) de courage, d'honneur et d'amitié virile (pas de rôles féminins, juste quelques silhouettes côté "sauvages"), que le réalisateur nous conte plus à la façon d'un western (ici un "northern", eu égard à la géographie) qu'à celle du péplum auquel on s'attendrait. A cet égard, son choix de casting est éclairant : les Romains, et donc Marcus au premier chef (Channing Tatum, à son meilleur) sont incarnés par des acteurs américains, quand les redoutables Pictes (le peuple "phoque") sont menés par l'"exotique" (et indécelable sous son enduit d'argile très "Guerre du Feu") franco-maghrébin Tahar Rahim, doublement césarisé en 2010 pour "Un Prophète", le gros de la tribu étant des Ecossais, et le "brigante" Esca le très "british" (et excellent) Jamie Bell. De chaque côté du Mur, en ennemis irréductibles, les colons et les "Indiens", ou même avec une lecture plus contemporaine, l'Oncle Sam ou l'impérialisme appliqué, en Afghanistan ou en Irak, par exemple. Lecture cohérente en fable "politique" donc, mais d'abord film d'aventures bien fait, avec par exemple de belles scènes de batailles et une haletante cérémonie d'initiation chez les "Phoques", et une nature superbement rendue à l'écran, grandiose, héroïque même, une nature des premiers âges, qui m'a fait penser à celle, magnifiée, lyrique, du "Guerrier silencieux".