Avant de nous concocter sa fable new age et fantastique que tout le monde connaît (le SDA, que j’ai personnellement beaucoup aimé), Peter Jackson a réalisé ce petit film dont l’emballage malingre cache de véritables trésors : la beauté est ici prétexte et vecteur d’une hystérie s’immisçant dans le quotidien de deux adolescentes inventives, coincées dans un monde qu’elles se sont forgé de toutes pièces et qui finira par les ensevelir dans un bain de sang. Diablement bien amené, le thème de cette étrange fascination juvénile pour un univers en dehors de toutes règles devient le vecteur d’images d’une poésie poignante (les figurines qui s’animent dans un château sombre et glauque, le jardin de fleurs, porte du IV ème monde), et Jackson réussit brillamment un pari insensé : sans excuser ni donner de fausses impressions de mea culpa, il parvient, via sa trame qui vire peu à peu au cauchemar éveillé (à l’instar des deux actrices principales, parfaites d’innocence et de cruauté inconsciente), à raconter le lent et terrifiant basculement vers la folie. Peu à peu, les teintes du film noircissent, les couleurs disparaissent au profit d’un gris et d’un noir ternes, et le rythme devient de plus en plus haché ; la tension qui se crée est alors palpable, et trouve son apogée dans une des scènes les plus insoutenables qu’il m’ait été donné de voir. La fin, à ce seul titre, est bien moins sanglante et violente que maints films d’horreur, et pourtant, peut être à cause de la nature de ce crime atroce, peut être aussi à cause de la façon de narrer de Peter Jackson, heurte, choque, et donne envie de pleurer (et pourtant je ne suis pas connue pour être sentimentale)
Original et soigneusement maîtrisé, regorgeant de très bonnes idées, ce film mérite d’être reconnu,ou revu, c’est pourquoi je lui donne la note maximale.