L'énergie qui habite chacun des deux camps de ce film (Scorsese et les Stones) ne pouvait le promettre qu'à un feu puissant. "Shine a Light" (USA, 2007) de Martin Scorsese, plus que d'assouvir un des grands projets du cinéaste (filmer les Rolling Stones), assouvit celui de nombreux fans du cinéaste. Très souvent nourri de leur musique, son oeuvre ne pouvait se dérober à leur rendre hommage. Le film, sans être entièrement un témoignage sur la carrière des Stones, rend honneur à la générosité scénique de leur prestation et capte la fougue que possède encore les quatre "papys du rock" à plus de soixante ans. Brasier, feu follet, incendie de joie, le concert inspire chacun de ces mots . "Shine a Light", une chanson des Stones, est également un prière que psalmodie avec une joyeuse véhémence Scorsese. Plus qu'allumer la lumière, Scorsese veut baigner de soleil le plateau où dansent, jouent et chantent les quatre monstres britanniques du rock. En mettant en scène sa difficile entreprise en introduction, en coordonnant scrupuleusement les axes de caméra, en insufflant en incipit son angoisse, Scorsese introduit les ingrédients de son cinéma, la tension indissociable qui se niche dans son oeuvre. Une fois certain que nous avons affaire à l'art du cinéaste, le grand show de Jagger, Richards, Watts et Wood s'entament dans un ébranlement grisant. Préconisant aux effets futiles de montage, la récurrente utilisation des contre-plongée, muant les musiciens en esprits du rock, Scorsese donne à la prestance du groupe une allure divine, auréolée par l'éclairage des projecteurs. En se confrontant ainsi à une des grandes inspirations de son cinéma, Scorsese signe un film fait de joie, enivré dans les spiritueux du rock, agité au rythme des plus grands tubes des Stones. Pour se libérer de la seule captation de concert, Scorsese incruste parfois entre deux chansons des images d'archives. Le plus frustrant, au son des guitares et à la voix insolente de Jagger, reste d'être assis.