Blasés de poser devant le miroir sans tain, les usual suspects forment une équipe malgré eux. Durs à cuire et imperméables aux interrogatoires, ils vont mener la police à rude épreuve dans une affaire qu'il va lui falloir peler comme un oignon avant d'espérer en tirer un coupable.
Cet oignon est au cœur du deuxième film de Singer, car c'est dans la conception de ses différentes couches que l'œuvre a gagné le plus de poids. Elles sont là constamment, du début à la fin, sans répit. Impitoyables de justesse, elles imposent leur domination froidement à un spectateur soumis. Et c'est un problème.
The Usual Suspects a la forme d'un thriller et l'intelligence caractérisant les meilleurs films à plot twist. Pour un peu, on croirait que c'est un opus de Mission Impossible ou des Ocean's, respectivement sans l'action et le frisson, mais avec quelques points de QI en plus. Et pour parvenir à cet objectif millimétré, ce ne sont pas tant des artistes que des ingénieurs qu'il a fallu employer.
Je n'ai formellement rien à reprocher au film, qui se tient à l'écart de tous les faux pas et de tous les abus. Il fait un usage propre de filons pas tellement suremployés qui, ensemble, constituent le divertissement que l'on en attend, un peu profond, un peu compliqué, où chaque tête d'affiche remplit ses promesses. Juste un peu, car il laisse de l'air au spectateur ; mais ce faisant, il a étouffé.
Aussi brillante soit-elle sous le jour d'une lecture purement technique, l'œuvre est automatisée, calfeutrée. Il n'y a pas de mouvements, juste des lieux ; aucun coup d'éclat, sauf sa fin ; et peu de points d'accroche, sinon les acteurs esclavagisés par la pose d'indices laissés au spectateur. C'est un film d'ingéniérie, conçu pour ne jamais faillir. C'est un film, enfin, qui ne m'a pas vendu de rêve.
→ https://septiemeartetdemi.com/