Après Chicago, Rob Marshall se délocalise en Italie et foire totalement son film, remake musical de Huit et Demi dont la subtilité est ici remplacée par une maladresse de chaque instant. Nine a des qualités, mais trop peu. Sa mise en scène est acceptable, maîtrisée, et sait faire dans l'excès sans pour autant être lourde. Tout le contraire du scénario. Pendant près de 2 heures, le film accumule cliché sur cliché, souffre d'un manque de finesse évident. Dans 8 et demi, le discours sur l'identité de l'artiste, ses influences, sa difficulté à créer, était brillante parce que discrète et sans afféterie aucune. Nine est tout à l'opposé, prend ses gros sabots pour dire les choses ( les asséner plutôt ), est beaucoup trop démonstratif pour convaincre. Le scénario est un peu à l'image de Daniel Day-Lewis, remarquable acteur par ailleurs, qui ici pousse le cabotinage à son maximum. Excessif donc. Le film est donc ridicule dans sa manière de dire les choses, mais pas seulement, puisque même les choses qu'il dit paraissent dépassées, appartenant à une autre époque. L'image des femmes tout d'abord, simples objets à la merci de l'homme qui est au centre de tout. On ne peut pas accuser un film de cautionner ce qu'il montre, mais Nine a du mal à éviter l'ambiguité. Ainsi, le personnage de Penélope Cruz ne semble être qu'une sal*pe avide de sexe, sans âme ni rien d'autre. Le problème du film c'est qu'il crée l'image d'une femme à partir de divers éléments pris chez chacun des personnages féminins. Pour Nine, et pour que l'homme soit heureux, il faudrait être un peu eugéniste et prendre un peu de chaque femme en rejetant tout le reste. Gerbant donc.
Nine a un casting féminin hallucinant, mais Rob Marshall ne sait pas filmer ses actrices, et seule Marion Cotillard parvient à tirer son épingle du jeu en donnant une fragilité touchante à son personnage blessé. Le film aurait pu être un hommage à ses actrices, mais il se plante, comme ailleurs il se plante quand il veut rendre hommage au cinéma italien. L'erreur première est de faire parler ses personnages en anglais, belle preuve du massacre hollywoodien quand il tente de s'inspirer d'un autre cinéma que le sien. Et puis le cinéma de Cinecitta ne ressemble en rien à la description faite de lui dans le numéro musical de Kate Hudson. Penser que l'Italie n'a été bonne qu'à fabriquer des stars comme Cardinale ou Mastroianni, c'est occulter la part intimiste majoritaire de son cinéma.
A la fin du film Daniel-Day Lewis décide de ne pas faire le film qu'il devait faire. On n'ira pas jusqu'à dire que Rob Marshall aurait dû prendre la même décision, mais il s'en faut peu pour qu'on le pense...parce que malgré ses défauts Nine est un film sympa, dont quelques numéros musicaux valent le détour. Dommage que le scénario soit passé à la trappe.