Et de cent. Avec un formalisme rigide et une mise en scène qui ne fait que se dérober (mais n'est-ce pas cela le cinéma, au fond, l'art du dérobage?), Im Kwon-Taek livre l'oeuvre du sommet de sa carrière, en ce qu'elle représente symboliquement. Mais "Souvenir" semble, de loin, l'un des films les plus fragiles du cinéaste. C'est un film qui n'ose pas, un film timide et naïf, visiblement imprégné d'une culture, d'un passé, d'un ventre, mais dont les rouages ne parviendraient pas à former un tout, une unité à la fois scénique et scénaristique. L'approche comtemplative du passé des hommes, des souvenirs d'enfance, de l'amour, de la violence d'un père ou d'un chemin déraisonnable, n'est pas ici le créateur d'une émotion ouatée ou, au contraire, trouble ; elle sert involontairement un excès de longueurs qui en disent long sur le malentendu entre la contemplation et l'ennui. La lenteur de ce centième film est justifiable, voire justifiée, mais elle n'entame pas autre chose que le simple piège d'un récit qui n'a pas grand chose à dire ou à faire ressentir. La confluence temporelle n'entraîne pas non plus d'interêt outre une simple recherche de nouveauté dans le langage propre du cinéaste ; les conjugaisons se mélangent et se perdent. On ne sait plus qui est qui, qui a fait quoi pour être comme ça, qui doit pardonner qui et qui aime qui et quoi. Les grandes lignes du récit sont simplement passées à la trappe au profit d'un entremêlement de souvenirs qui, s'ils n'ajoutent aucune expression dans le recours à l'abstrait, sont carrément la cause de l'interminable étirement de l'histoire. Cette recherche de complexité formelle dans un cadre simple ôte toute vérité identitaire au film ; il semble vouloir épater, émouvoir, nous faire attendre une fin sublime, alors qu'en réalité "Souvenir" est un film sans début et sans fin. Pour jouer sur les mots, on serait presque dans un film de milieu. Alors oui parfois certaines qualités débordent du cadre ; les images sont souvent belles, l