C'est quand même étrange, pathologique voire symptomatique d'une dégénérescence maintes et maintes fois déjà prouvée que le public (tant la presse que les spectateurs) voit ce film, en majorité l'aime et même l'adore - pour certains aspects j'en fais partie. Pendant 3 heures on nous montre du cul à gogo, de l'exubérance outrancière, de la surenchère à foison, d'un fou de la finance et de son entourage, et on adore. Quelque part on se fait bien sodomiser, je veux dire au-delà de l'humour et l'ironie qui en découlent, c'est tout de même inquiétant qu'un tel film soit autant apprécié. Car si on reste au 2nd degré, alors là oui les passions se déchaînent, Di Caprio est extraordinaire (et je le crois sincèrement), il y a des scènes cultes (lui qui rampe par exemple jusqu'à sa voiture), et on se marre souvent devant cette apologie de la débauche - à tous les niveaux. Et ce n'est ni l'ironie constante ou l'évolution de l'histoire qui m'ôteront ce sentiment dérangeant de gratuité. Alors on pourra dire que cette exubérance est justement la raison d'être du film, et que ce serait débile de mettre à côté du politiquement correct pour atténuer le tout... oui c'est certain, mais paradoxalement ça légitime encore moins l'idée de montrer ça à l'écran. Cela me fait penser assez à Docteur Folamour de Kubrick, où l'on joue - avec pas mal d'ironie - l'avenir du monde sur des bombes nucléaires : c'est totalement fou, exubérant, mais j'arrive pas à considérer la chose sans grincer des dents, j'en retiens surtout son côté maladif, inquiétant, et ça me fait questionner sur l'idée même de montrer ce genre de choses à l'écran ; c'est peut-être la finalité du truc, de la part des réalisateurs de nous interroger face à notre propre fascination/répulsion, et par tant de succès prouver que quelque chose ne tourne pas rond ici-bas... Mouais, non c'est vrai, mais moi comme ça me dérange, je serais beaucoup moins subtil et plutôt partisan du : "faut pas regarder ce film", car il entretient ce mythe de l'absurde que nous envions tous quelque part. J'avoue, avoir ce genre de point de vue c'est un peu décalé, voire dépasser, mais voilà au-delà du 2nd degré et de l'ironie de ce film de Scorsese, dès que je tente de l'intégrer je ne parviens pas à enlever ce goût amer, cette dangerosité subtile qu'est en lui-même Le Loup de Wall Street, confronter les propres vices du spectateur à ceux du héros...