Sam Mendes dirige sa femme, l’actrice Kate Winslet, l’une des premières attachée au scénario, au projet, et Leonardo DiCaprio, reformant pour l’occasion l’un des plus célèbres couples de l’histoire du grand écran, merci James Cameron. Mendes, avec le style que l’on lui connaît, illustre un propos qui tient d’avantage de la psychologie sociale que du véritable récit, jouant avec les peurs de solitude, d’enferment, d’auto destruction de chacun, et ce même si les noces rebelles, un titre français pour une fois formidable, se déroule en l’an 1955 en pleine banlieue aisée américaine. La réussite sociale semble donc ici rimer avec prison dorée, empêtrement dans les méandres d’une vie préconçue et sans surprise pour le lendemain.
Le couple, formidable à l’écran, le contraire aurait été étonnant, que fonde ladite April et ledit Frank est un modèle de réussite d’intégration sociale. Une maison chic, un boulot avec de belles perspectives, des rentrées d’argent confortables, deux enfants, voilà le train de vie, le mode de fonctionnement du couple. Oui, mais ce dernier semble souffrir d’un mal qui ronge chacun d’entre nous, la peur d’un lendemain morne et sans réjouissance. La femme souffre de sa situation, l’homme aussi mais n’aura ni la volonté ni le courage de tout lâcher et de repartir selon les envies de son épouse. De là naît un conflit conjugale, un drame sentimentale qui mènera le public vers un final glaçant, nous faisant ouvrir les yeux sur des soucis de conscience plus ou moins anodin qui peuvent détruire une existence, voire deux ici.
Le tandem Winslet/DiCaprio fonctionne à merveille, et ce même si les deux comédiens ne sont pas les seuls ténors ici présents. Oui, l’on notera la présence de Kathy Bates, mais aussi et surtout d’un certain Michael Shannon, tout simplement excellent. L’acteur incarne la folie, la maladie psychique, tout en étant malgré tout le seul bonhomme à comprendre le besoin d’évasion, la peur de l’insignifiance du jeune couple. A ce titre, les noces rebelles est un film d’acteurs, un film ou le jeu des interprètes fait quasiment toute la différence. Pour le reste, l’on pourra compter sur les talents de Sam Mendes, à son meilleur depuis American Beauty et sur une Bande son signée le formidable Thomas Newman.
Un film au message douloureux mais résolument le reflet de bien des pensées populaires. En vouloir toujours plus sans l’obtenir, vouloir tout lâcher sans en avoir le courage, vouloir changer d’avenir sans les promesses d’un confort présent, le tout débouchant sur une véritable psychose. Infidélité comme seule remède à l’enfermement conjugal, engeulades comme seul discours entre un homme et sa femme, l’on souffrira avec le mari et madame du drame qu’ils se construisent eux-mêmes. La force du film, d’un petit rien, d’une faiblesse d’esprit, Mendes ou le romancier, disons, à la base du récit, nous dirige vers un drame, un pétage de plombs désastreux. Emouvant mais aussi peut-être un peu lisse, si fallait y trouver quelque défaut. 16/20