Totally Fucked Up soulevait des questions assez dures (sur l'homosexualité, la drogue et la dépression) et visait par conséquent un public assez restreint. The Doom Generation, le deuxième opus de la Teenage Apocalypse Trilogy, reprend ces thèmes et les aborde sous un angle beaucoup moins sérieux. En effet, le réalisateur abandonne les affres du film d'auteur raté pour se jeter à corps perdu dans la comédie trash et kitsch, pour le meilleur et pour le pire. The Doom Generation fait partie de ces films indépendants (et underground) sortis dans les années 90 qui revendiquait une certaine contre-culture, à la manière de Clerks. Il partage avec ce dernier certains traits communs, notamment un sens aigu du dialogue. Sauf qu'Araki, aimant bien choquer, n'hésite pas à placer des vulgarités très inventives dans la bouche de la toute jeune Rose McGowan. On se retrouve donc avec des échanges verbaux rappelant à la fois des dialogues de pornos et de films de Tarantino, ce qui est absolument génial. L'humour repose aussi sur la représentation caricaturale des États-Unis, qui est surtout montrée lorsque les trois personnages principaux interrompent leur cavale pour aller dans un bar, une station service ou un fast-food. Bien sûr, cela a déjà été fait, mais ces scènes sont des merveilles : déjà il y a le caractère désabusé des trois jeunes qui fait mouche, puis il y a les pancartes affichées un peu partout, délivrant des slogans tantôt cyniques, tantôt absurdes. Enfin, il y a les personnes qui tiennent les magasins, complètement cinglées, qui finiront tuées par les héros, dans des scènes qui n'ont rien à envier à Evil Dead. La narration prend ainsi une construction à la Scott Pilgrim : on attend toujours ce qu'il va se passer lors du prochain arrêt. Seulement voilà, à partir du moment où le réalisateur commence à s'intéresser au ménage à trois qui s'installe doucement, le film devient subitement sérieux. A part le côté benêt de James Duval, l'humour disparaît complètement. Araki multiplie les scènes de cul pour masquer son manque d'idées, ce qui finit par ennuyer. Et quand on voit la fin, on se dit qu'il ne savait pas trop comment conclure. Je me doute que c'est à prendre au second degré, mais c'est tellement glauque que cela ne prend pas. The Doom Generation partait donc super bien mais change inexplicablement de ton vers les deux tiers du film. La seconde partie, beaucoup plus dans l'esprit de ce que fait Araki habituellement, ternit accidentellement l'ensemble. Cela reste à voir pour le travail sur les couleurs et les dialogues, qui sont, comme je l'ai déjà dit, complètement mythiques.