Si vous êtes un minimum renseigné sur l’histoire du cinéma et les réalisateurs qui ont défilé le long des années depuis les 50’s, vous connaissez probablement Edward Davis Wood Junior, aussi surnommé comme étant "le pire réalisateur de l’histoire du cinéma" depuis 1980. De son vivant, ses films ont été d’énorme échec auprès du public à tel point que ce pauvre gars à sombré dans l’alcoolisme et la dépression avant de mourir en 1978 à cause de ses problèmes d’alcool.
Et pourtant, aujourd’hui cet homme est passé à la postérité et a même gagné une certaine notoriété auprès des cinéphiles passionné dans le milieu, à tel point que l’un de ses films "Plan 9 From Outer Space" est désormais apprécié comme un nanard divertissant parmi les plus connaisseurs. Edward Davis Wood Junior a, depuis, gagné le respect de plusieurs cinéphiles dans le milieu du cinéma pour la sincérité de son travail malgré la nullité de ses films.
Concernant la biographie Ed Wood sorti en 1994, elle se base sur une biographie écrite et le point de vue du réalisateur dont l'histoire est conté. Ce qui est amusant à savoir, c’est que Tim Burton ne devait pas réaliser ce film à la base, mais le produire avant qu’un imprévu ne s’impose et qu’il mette la main à la pâte. Et à mon grand étonnement, moi qui n’attendais rien du film le plus méconnu de sa filmographie : je me suis surpris à m’y attacher après avoir terminé le visionnage et je pense qu’il y a tout intérêt à faire une critique sur ce film, après tout je n’ai pas mis la note maximale sans raison.
S’il y a bien un élément qui se démarque de l’ensemble de ses autres films, c’est sa mise en scène et sa réalisation qui sont ici beaucoup plus réaliste que dans n’importe quel autre de ses films. Le metteur en scène privilégie la direction d’acteur aux techniques de caméra et au découpage des scènes, les plans et déplacement de caméra sont simples et focalisés principalement sur Ed Wood et ses compères. Tout cela dans le but de rendre le film le plus ancrée à la réalité de l’époque ou les productions hollywoodiennes triomphaient, et le résultat est simplement saisissant. Les quelques moments ou Burton effectue des mouvements de caméra et une mise en scène plus fantaisiste se déroulent dans la maison de Béla Lugosi, un célèbre acteur qui avait interprété de nombreuses créatures fantastique dans des films d’épouvante comme Dracula, d’où le premier intérêt de rendre la mise en scène plus farfelue. On a le droit à
des ombres projetées lorsque Béla va cherché sa morphine dans la salle de bain ou une cadre en contre-plongée lors de la scène ou Edward tente de convaincre Béla de ne pas se suicider justement pour faire ressentir l’admiration que partage Ed Wood envers Béla et ses impressions à la limite de l’irréel lorsqu’ils se retrouvent chez lui.
Tim Burton a fait un travail remarquable sur cette biopic au niveau de la mise en scène, et je ne peux que l’en féliciter personnellement.
Du côté de l’orchestration et de la bande-son, Danny Elfman avait cédé sa place pour ce film à Howard Shore après un petit différent entre Burton et Elfman. Le compositeur habituellement attitré de Martin Scorsese et Peter Jackson livre ici un générique d’introduction à ambiance de film de monstre des années 1950 avec les bruitages de ces vieux films, ce qui est un bel hommage à ces productions de l’époque et le reste des mélodies sont très ancrées à l’ambiance des films en noir et blanc. C’est très bien orchestré une fois de plus, et ça ne rend le film que plus mémorable qu’il ne l’est déjà.
Mais il y a bien deux points qui sont mémorables et particulièrement réussis (en plus de la musique et de la mise en scène), ce sont les personnages et le jeu des acteurs. Johnny Depp était en tête d’affiche et avait pour objectif de jouer le célèbre Ed Wood, et autant il est hilarant et classe dans le rôle de Jack Sparrow avec "Pirates de Caraïbes", autant il est très drôle et terriblement attachant et appréciable à mes yeux en tant que pauvre réalisateur minable qui se bat pour que ses rêves se concrétisent. Il a beau faire des films pourri, on sent qu’il aime ce qu’il fait et qu’il y met de la passion, il adore son travail et ça suffit à en faire un très bon personnage, après je préfère ne pas trop en dévoiler plus sur la vie privée qui est dépeint de Ed Wood, il faut le découvrir par soi-même. Et s’il y a un point qui soulève vraiment sa passion pour l’art du cinéma, c’est son amitié et son admiration avec Béla Lugosi ainsi que ses interactions avec cet acteur désormais à la dérive et qui accepte de reprendre du service par amitié pour son admirateur. Non honnêtement, je n’ais quasiment rien à reprocher à Depp, il interprète tout simplement un de ses meilleurs rôles dans cette biopic.
Il en va de même pour Martin Landau alias Béla Lugosi, récompensé à juste titre aux Oscars pour son interprétation. L’acteur est sincère et souvent touchant quand il doit jouer l’acteur hors des scènes tourné par Ed Wood, et il est aussi très crédible quand il joue un double rôle. Ça n’a rien d’évident de devoir interpréter un personnage dans un film tourné à l’intérieur d’un film, mais Landau est époustouflant dans chacune de ces scènes.
En dehors de Landau et Depp, nous avons aussi Bill Murray qui est hilarant dans le rôle d’un Bunny Breckenbridge qui ne rêve que de changer de sexe, Sarah Jessica Parker tout aussi drôle, une Patricia Arquette plutôt agréable et douce, George Steele en catcheur Tor Johnson qui fait le travail comme il faut et enfin une Lisa Marie en Vampira également sympathique et amusante. Oh et, notons aussi un sympathique caméo de Vincent D’Onofrio, mais je ne dis pas en quel personnage et quand il apparaît. Bref, Burton a privilégié la direction des acteurs ainsi que la représentation des personnages dans le film à la mise en scène, un choix judicieux même si on se doute que certains éléments ont été modifié dans la version final mais si ça rend le film et les personnages plus mémorables et appréciables, pourquoi s’en plaindre ?
Il est maintenant temps de parler maintenant du script de Scott Alexander et Larry Karaszewski qui scénarisent également "Big Eyes". Le premier élément qu’on prendra en compte est le fait de raconter cette biographie du point de vue d’Edward Davis Ed Wood,
à l’exception d’une seule scène ou des producteurs de la Warner regardent le film qu’il a réalisé.
Donc tout ce qui nous est montré est vue du point de vue du réalisateur, mais avec une vision réaliste et des protagonistes humain. Néanmoins, Burton trouve le moyen d’insérer plusieurs clins d’œil à son cinéma habituel
comme le plan large sur Ed Wood et sa bande lorsqu’il se rende à l’avant-première de l’un des films du mec qui fait penser aux galeries de bêtes de foires que Burton créer dans beaucoup de ses films,
certains personnages parlent de la mort de manière comique mais ça passe aussi vite que c’est venu donc ça passe sans problème. Toutefois, je ne peux pas parler des clins d’œil qui ont été fait aux films de Edward Davis Wood Junior car je n’ai vu aucun film du pire réalisateur du monde alors je laisse le soin aux connaisseurs d’en faire part.
Ce qui est le plus étonnant avec Ed Wood, c’est justement de nous faire aimer un réalisateur minable qui pourtant croit en ses ambitions et à ses rêves, en plus de faire un film qui s’ancre totalement à la réalité, loin des réalisations fantastiques avec un humour noire sur la mort auquel Burton nous a joyeusement habitué. De plus, le réalisateur a admis lui-même qu’il y avait des éléments qu’il appréciait dans ce film comme l’amitié entre Béla et Edward qu’il a comparé avec son amitié envers Vincent Price. Et rien que pour ça, le metteur en scène a rendu un splendide hommage à Ed Wood en réalisant l’un de ses meilleurs films, un bel hommage à la SF de l’époque et en quelque sorte une belle déclaration d’amour au cinéma.
Et pour tout ça, je n’hésiterais donc pas à le dire : "Ed Wood" est devenu mon Burton préféré devant "Sweeney Todd", "L’étrange Noël de Monsieur Jack" et "Sleepy Hollow", et peut être bien l’un de mes films préférés. L’écriture est parfaite, la réalisation impeccable, l’histoire et la biographie d’Ed Wood passionnante, l’humour est agréable, que dire de plus ? Si les scénaristes de ce film arrivent à faire du bon avec "Big Eyes" (une nouvelle biographie d’ailleurs), je n’ai que plus envie de voir le prochain Burton en date.
Si vous êtes un passionné de cinéma et de son histoire, "Ed Wood" est clairement un film que je peux vous conseiller car il mérite d’être vu par toute personne qui aime le cinéma rien pour parler d’un des réalisateurs les plus particuliers qui aient existé.